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Saint-Domingue contre cette classe ; mais c’était déjà un triomphe.

Ce ne fut qu’à la fin du mois de mars 1792, après une discussion solennelle dans l’assemblée législative, que, s’étayant des principes de la déclaration des droits et de ceux consignés dans le décret du 29 mai 1791, par lequel l’assemblée constituante avait exposé les motifs de celui du 15 dudit mois, les partisans des hommes de couleur réussirent à l’emporter sur leurs adversaires. Barnave lui-même, auteur des deux décrets du mois de mai, avait écrit ce qui suit, en parlant du décret du 28 mars 1790 qui reconnaissait implicitement les droits des hommes de couleur : — « qu’il ne dépendait pas de l’assemblée constituante de se refuser à rendre le décret du 28 mars ; qu’il ne dépendait pas d’elle d’en restreindre le sens, en portant atteinte aux droits essentiels des citoyens ; qu’elle ne pouvait accorder à une partie de l’empire la faculté d’exclure des droits de citoyens actifs, des hommes à qui des lois constitutionnelles assurent ces droits dans l’empire entier ; que les droits des citoyens sont antérieurs à la société, qu’ils lui servent de base ; que l’assemblée nationale n’a pu que les reconnaître et les déclarer, qu’elle est dans l’heureuse impuissance de les enfreindre. »

Les colons et leurs partisans se trouvaient donc pris, pour ainsi dire, dans leurs propres filets. Le trop coupable Barnave avait, sans s’en douter, préparé lui-même le triomphe des droits des hommes de couleur, en rédigeant le décret du 29 mai 1791. Celui du 24 septembre se trouvait frappé d’annulation par les principes mêmes énoncés dans le précédent.

En conséquence, le 28 mars 1792, l’assemblée légis-