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et tout indique qu’en les signant, les blancs ne comptaient pas les exécuter. La municipalité de Cavaillon écrivit à l’assemblée coloniale, que ses commissaires n’avaient accepté le traité de paix que pour avoir la tranquillité, et conformément aux lois. L’assemblée du Sud fait le même aveu, à plusieurs reprises, dans une lettre à l’assemblée coloniale. La ville des Cayes n’était pas plus sincèrement réconciliée avec les hommes de couleur. On peut en juger par une lettre que le commandant du Sud, Mangin d’Ouence, écrivait à Blanchelande pour lui témoigner ses perplexités sur le traité fait avec la ville des Cayes. — « Si je le reconnais, disait-il, j’enfreins la loi, parce que la commune des Cayes, considérée isolément, n’a pas le droit de déroger aux lois constitutionnelles de l’État. D’un autre côté, mon refus peut porter les hommes de couleur aux plus cruelles extrémités ; la torche brûle dans leurs mains… Je crois qu’il serait bien à désirer pour cette province, livrée à ses propres moyens de défense, que MM. les commissaires gardassent le silence jusqu’à l’arrivée des troupes ; actuellement nous sommes assurés que les gens de couleur, qui ne veulent reconnaître ni les commisaires venus de France, ni l’assemblée nationale, ni celle coloniale existante, se porteront aux dernières extrémités, s’ils entrevoient que leurs traités ne soient pas exécutés. »

« Les troubles qui ne cessaient d’agiter les paroisses voisines de l’Ouest, continue Garran, ne fournirent que trop de prétextes pour rompre une paix si mal assurée. On peut induire de quelques aveux des blancs eux-mêmes, que les hommes de couleur ne furent pas les agresseurs ; mais tous les mémoires que nous avons sous les yeux attes-