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dit-il, de la violation du traité par les colons blancs du Port-au-Prince, de leur trahison atroce, et des moyens qu’ils avaient employés pour anéantir les hommes de couleur. J’écrivis de suite à mes frères du Sud, je les instruisis de ce malheureux événement qui annonçait évidemment le projet de nous exterminer ; je les engageai à se méfier des colons des Cayes, dont les intentions étaient aussi perverses que celles des scélérats du Port-au-Prince ; je les invitai à se mettre en mesure, pour repousser par la force une agression injuste ; et je revins me réunir à ceux de mes frères qui se préparaient à une nouvelle défense[1]. »

Mais déjà, le même jour du 21 novembre, l’assemblée provinciale du Sud et la municipalité des Cayes faisaient naître une rixe entre un blanc et un mulâtre, pour arriver au même résultat qu’au Port-au-Prince. La sortie des hommes de couleur des Cayes fut donc occasionnée par cette rixe particulière : ils allèrent se camper sur diverses habitations. Les blancs de cette partie s’empressèrent d’armer le dixième de leurs esclaves, pour détruire les hommes de couleur. Dans le même temps, ceux des quartiers de la Grande-Anse et de Tiburon opéraient la même organisation contre les mulâtres de ces quartiers. Mais, dit Rigaud, « les noirs que les colons avaient armés pour combattre à leurs côtés, clairvoyans sur leurs vrais intérêts, convaincus que leur cause était liée à celle de leurs parens, se réunirent à eux, et conçurent, à leur exemple, le projet de conquérir leur liberté[2]. » Ce qu’il dit ici des noirs ne doit s’entendre que de ceux des Cayes et des parois-

  1. Mémoire de Rigaud déjà cité, page 11.
  2. Ibid., page 12.