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Sonthonax accusa Pinchinat principalement de la déportation des suisses : il le fît en ces termes :

« Ce Pinchinat qui, en 1791, a sacrifié trois cents noirs à la rage des factieux du Port-au-Prince, en stipulant leur déportation à la baie Honduras, pour prix de leur fidélité aux hommes de couleur, et du sang qu’ils avaient versé pour leurs droits… »

Mais Rigaud, en l’absence de Pinchinat parti pour France, publiant son mémoire en date du 18 thermidor an V (5 août 1797), que nous avons déjà cité, réfuta cette diatribe par ce passage :


« Que Sonthonax rougisse de honte, si toutefois son front peut rougir encore, d’accuser Pinchinat d’avoir sacrifié trois cents noirs à la rage des factieux du Port-au-Prince : non, Pinchinat ne les a pas sacrifiés. Il a pu être trompé par ces factieux (eh ! nous l’avons été si souvent !) ; il croyait qu’il en résulterait une plus grande somme de bonheur pour tous les citoyens en général, et pour ces noirs en particulier ; on devait leur procurer tous les moyens possibles pour couler des jours paisibles et heureux. Pinchinat et nous tous en étions si convaincus, que nous envoyâmes avec eux quatre de nos frères pour être les témoins de leur bonheur. C’est donc contre ces factieux seuls que Sonthonax devrait s’élever ; mais non, ce sont aujourd’hui ses bons amis ; il est leur plus zélé partisan et leur plus chère idole. Mais, voici un dilemme auquel je défie Sonthonax et tous ses partisans de répondre : ou Pinchinat était un scélérat en 1791, ou il ne l’était pas. S’il l’était, Sonthonax est un grand scélérat d’avoir nommé, en 1793, ce même Pinchinat non-seulement membre de