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cipalité de cette ville voulait absolument qu’on les condamnât à mort. Peu de temps après, des scélérats montent sur le navire durant la nuit ; et, après avoir renfermé le capitaine dans sa chambre, ils choisissent soixante des plus vigoureux de ces malheureux nègres, leur coupent la tête, les uns après les autres, et les jettent dans la rade du Môle où l’on vit pendant plusieurs jours flotter les cadavres de ces infortunés, sans que les autorités constituées ni l’assemblée coloniale aient rien fait pour la punition des coupables. Le surplus des suisses périt de misère sur ce bâtiment, à l’exception de dix-huit que Sonthonax retira en 1793 : c’était le reste de plus de deux cents qui avaient été originairement embarqués. »

Les scélérats qui tuèrent les soixante suisses étaient des blancs de l’Artibonite, appelés Saliniers.

Tel fut le sort de ces infortunés. On voit dans ces diverses relations des faits toute la méchanceté des blancs du Port-au-Prince. Ils ne se contentent pas d’obtenir la déportation de ces hommes sur une plage étrangère ; et sous le prétexte que les hommes de couleur pourront les réintroduire dans la colonie, ils les font jeter sur un point autre que celui dont on était convenu, pour qu’ils périssent de faim. Échappés à cette horrible mort par hasard, et conduits au Cap, et ensuite au Môle, on en fait assassiner une partie. Ni l’assemblée coloniale, ni Blanchelande, ni les commissaires civils, arrivés depuis environ trois mois, ne s’intéressent à eux.

Les blancs du Port-au-Prince avaient paru effrayés de l’armement des suisses. Cependant, un mois après