de couleur, candide, fut gagné par Boukman, et donna lecture de cette gazette à des esclaves de la plaine, réunis secrètement, le 14 août, sur l’habitation Lenormand de Mézy, au Morne-Rouge : la majeure partie des esclaves réunis étaient des commandeurs. Boukman annonça à ces conjurés que l’on attendait de nouvelles troupes d’Europe qui venaient pour exécuter les lois de la métropole, et qu’alors les esclaves se soulèveraient afin que cette exécution ne manquât point, et que lui-même donnerait le signal en se soulevant avec l’atelier de l’habitation Turpin dont il était l’un des commandeurs. Cette information donnée de la prochaine arrivée de nouvelles troupes qui devaient agir de concert avec les esclaves, n’était qu’une ruse des chefs de cette fameuse conjuration, ruse inventée pour décider les esclaves : car, ces hommes encore timides redoutaient la force et la puissance de leurs maîtres.
» Boukman eut aussi recours à la magique influence du fétichisme. Il conduisit ces hommes crédules au bois nommé Caïman, situé sur cette habitation Lenormand de Mézy : là, une prétresse plongea le couteau dans les entrailles d’un cochon noir ; la victime bondit, le sang ruissela ; les conjurés en burent avec avidité. À genoux, Boukman prêta le terrible serment de diriger l’entreprise, serment commandé par la prêtresse : les assistants jurèrent après lui, dans la même attitude, de le suivre et d’obéir à ses volontés.
» Les esclaves des habitations Chabaud et Lagoscette, réunis sur l’habitation Lenormand de Mézy, comprirent mal les explications de Boukman : dans la soirée ils mirent le feu à ces deux habitations. L’insurrection devait commencer par l’incendie de ces palais somptueux