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un moyen de se venger des blancs, par le bouleversement des propriétés dans le Nord. Félix Carteau imputené néanmoins cette révolte à l’initiative du parti contre-révolutionnaire du Cap, dans le quel il confond Blanchelande et tous les officiers militaires ; car il dit que, dans les mesures prises par ceux-ci pour combattre les noirs, les militaires étaient d’intelligence avec les révoltés. Il cite enfin plusieurs prêtres, curés des paroisses du Nord, qu’il désigne comme des agens de la contre-révolution ; il cite aussi l’abbé de La Haye, curé du Dondon, l’apôtre le plus ardent de la liberté des noirs, et il n’oublie pas de signaler encore le marquis de Cadusch qui, accusé devant l’assemblée coloniale qu’il présidait, dut s’en défendre en comité secret, attribuant à ce colon, ruiné par le jeu, l’idée de la révolte comme un moyen de se soustraire à ses créanciers.

Bryand Edwards, planteur et président de l’assemblée coloniale de la Jamaïque, qui vint au Cap un mois après l’incendie de la plaine du Nord, dans son histoire de Saint-Domingue de 1789 à 1794, attribue aussi la révolte des esclaves, comme l’insurrection des mulâtres, à l’influence des principes de la société des Amis des noirs, de Paris, et même de celle de Londres, à laquelle il reproche d’avoir fait répandre dans les colonies anglaises des images et des gravures. Il s’étonne même que les esclaves de la Jamaïque n’aient pas tracé l’exemple à ceux de Saint-Domingue, tout en convenant d’ailleurs que d’eux-mêmes a pu naître l’idée de la révolte, conséquence naturelle de l’esclavage. Il dit « qu’à Saint-Domingue, une partie très-considérable des insurgés étaient, non des Africains, mais des créoles ou des naturels ; la plupart des meneurs étaient des domestiques