mousqueterie et de l’artillerie, toute l’armée rebroussa chemin pour se porter au feu. Pétion fut un des premiers à s’y rendre. Borgella, comme tous les autres qui étaient déjà rendus à une longue distance, accourt avec eux et partage le danger de ses camarades. Ces jeunes hommes, pleins d’ardeur, furent heureux de trouver cette occasion de payer de leurs personnes. Le feu mis par eux aux champs de cannes à sucre de Pernier achève de dérouter les blancs attaqués avec résolution et intrépidité : ils sont dispersés et se sauvent dans toutes les directions, en laissant sur le carreau plus de cent morts ou blessés. De nombreux prisonniers tombent au pouvoir des cavaliers de couleur.
La défaite d’Ogé et de Chavanne était vengée !
Dans cet assaut donné au camp, un officier du régiment d’Artois allait être tué, lorsque Pétion accourt à lui, le saisit et le protège contre la fureur de ses camarades, en risquant sa propre vie : il réussit dans ce noble mouvement de générosité. À ce trait, tous applaudissent, et le carnage cesse.
Ainsi débuta Pétion dans cette carrière des armes qu’il parcourut si glorieusement et qui fut remplie d’épisodes où l’humanité ne le céda en rien à la valeur. Là aussi commença cette influence immense qu’il a exercée sur ses concitoyens.
À vingt-sept ans de là, sur le point de descendre dans la tombe, sa dernière action fut encore déterminée par un sentiment humain et généreux. Président tout-puissant d’une République qu’il avait fondée, il réclama le consentement préalable d’un colonel noir sous ses ordres, pour exercer le droit de grâce, qui était dans les attributions de son autorité presque souveraine, envers un