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couleur à Diègue et à Métivier ; ils furent accueillis comme des auxiliaires, et se rangèrent sous les ordres des mulâtres et nègres libres qui avaient avec eux leurs propres domestiques noirs : on en forma un corps auquel on donna le nom de suisses, à cause de cette qualité d’auxiliaires, par allusion aux enfans de l’Helvétie qui, en Europe, ont l’habitude de s’engager comme tels au service de la France et d’autres puissances. Ces esclaves considéraient et devaient considérer les hommes de couleur comme leurs protecteurs naturels. Nous verrons bientôt si ces derniers comprirent leurs devoirs envers leurs alliés.

À peine arrivée à Métivier, l’armée jugea que cette position lui offrait moins de chances de résistance et de succès, qu’elle n’en aurait trouvé au Trou-Caïman, l’une des positions militaires qu’offrait la montagne des Grands-Bois, adossée au Mirebalais. Bauvais et Lambert levèrent le camp de Métivier pour s’y porter.

Il fallait passer, pour se rendre au Trou-Caïman, devant l’habitation Pernier et par la Croix-des-Bouquets. Les chefs ordonnèrent de ne pas attaquer les blancs ; et se plaçant à l’avant-garde ou au centre de l’armée en marche, ils confièrent l’arrière-garde, au commandement de Doyon aîné sur la prudence duquel ils comptaient. Mais, peu avant cette arrière-garde, marchait le fougueux Obran déjà irrité, comme nous l’avons dit, par la mort de son jeune protégé : il excita quelques jeunes gens à provoquer et attaquer les blancs au camp de Pernier[1]. Le combat s’engagea : Doyon fut forcé d’y prendre part, pour ne pas laisser écraser ces imprudens. Au bruit de la

  1. Dans sa lettre du 30 septembre, H. de Jumécourt dit que ce sont les blancs qui attaquèrent.