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blancs dont l’instrument fut le trophée de l’action, et un jeune blanc, orphelin, qu’Obran avait élevé comme son fils, et qui avait suivi son bienfaiteur pour partager ses dangers. La perte de ce jeune homme fit ressentir une vive peine à Obran qui résolut de le venger : il en trouva l’occasion peu après.

À l’arrivée des fuyards au Port-au-Prince, l’effervescence de la classe blanche fut à son comble. Les deux assemblées, municipale et provinciale, organisèrent une troupe de quelques centaines d’hommes des régimens d’Artois et de Normandie, et de matelots de plusieurs nations, embrigadés sous les ordres du Génois Praloto, et désignés sous la dénomination de flibustiers, en mémoire des premiers fondateurs de la colonie. Cette troupe sortit de la ville avec deux pièces de canon de campagne, pour aller prendre position sur l’habitation Pernier, située dans la plaine, au bas des mornes de la Charbonnière. Cette position devait donner aux blancs le moyen de mettre les mulâtres entre deux feux, lorsqu’ils auraient fait sortir d’autres troupes du Port-au-Prince pour les attaquer. Bauvais comprit leur dessein et porta son camp sur l’habitation Métivier, située dans la montagne de Bellevue, limitrophe avec celle de la Charbonnière.

Avant la réunion de Diègue, plusieurs ateliers d’esclaves s’étaient agités dans la paroisse du Port-au-Prince ; mais les blancs avaient facilement réprimé ces mouvemens qui n’étaient point concertés. Après cette réunion, d’autres mouvemens séditieux avaient eu lieu dans les montagnes abandonnées par les blancs[1]. Quelques centaines de ces esclaves vinrent se réunir aux hommes de

  1. Lettre de Hanus de Jumécourt à Blanchelande, du 30 septembre 1791.