Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 1.djvu/190

Cette page a été validée par deux contributeurs.

cès des hommes de couleur, lui rendit affection pour affection : il respecta celui dont il honorait déjà le nom qu’il devait honorer encore plus dans la suite. Il arriva un temps où il étendit son affection sur des sœurs blanches, habitant Bordeaux ; il fut généreux envers elles, en leur faisant parvenir des moyens pécuniaires : ce fut dans les années qui suivirent 1815, époque du rétablissement des relations entre Haïti et la France.


C’est ici le lieu d’examiner s’il y a eu quelque chose de fondé dans les reproches amers adressés par les colons de Saint-Domingue aux mulâtres de cette colonie qui revendiquaient leurs droits politiques, d’après l’ordonnance de 1685 et les principes de la déclaration des droits de l’homme, publiée en France par l’assemblée constituante.

Ils leur reprochèrent d’être des fils dénaturés, qui méconnaissaient leurs pères, leurs bienfaiteurs, auteurs de leur liberté et de leur fortune ; ils les insultèrent, en leur disant qu’ils étaient les fruits honteux du libertinage, une race bâtarde qui ne pouvait pas, qui ne devait pas aspirer à être leurs égaux ; ils prétendirent enfin que les blancs avaient droit à leur respect, à leur soumission ; et ils firent de cette prétention inique le texte d’un serment qu’ils voulurent exiger d’eux, dès le début de la révolution, en persécutant ceux qui se refusèrent à le prêter.

Ces reproches, ces injures, nous venons de les voir consignés dans le discours de l’abbé Maury ; nous les retrouverons bientôt dans les actes officiels de Blanchelande, ce faible et coupable gouverneur qui encourut lui-même tant de reproches fondés.