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classe, se préparaient méthodiquement à ce rôle honorable. Agissant d’après les conseils de Pinchinat, dont les lumières étaient supérieures à celles de ses frères « et qui, dit Garran, dans une carrière si neuve pour lui, n’a cessé de montrer, avec le patriotisme le plus recommandable, une sagesse et des connaissances qui démentent bien tout ce que les colons blancs répandaient en France sur l’ignorance et l’incapacité des hommes de couleur, » ils le nommèrent président d’un conseil composé d’une quarantaine d’entre eux, dont le siège principal était dans la paroisse du Mirebalais[1].

Cette paroisse avait été préférée par eux, à cause de sa position toute militaire et de la force numérique de sa population de couleur. D’autres hommes supérieurs par leur intelligence étaient membres de ce conseil politique : c’étaient Bauvais, André Rigaud, Labastille, Daguin, Marc Borno, Renaud Desruisseaux, Desmares, Faubert, J. Boury, etc. Plusieurs d’entre eux étaient du Sud.

Ceux du Nord ne pouvaient rien en faveur de leur classe : ils étaient contenus sous le joug de la puissance militaire du Cap, où se trouvait le gouverneur Blanchelande, et par les échafauds dressés en permanence, depuis la mort d’Ogé et de Chavanne.

Ceux du Sud, dispersés depuis la dissolution du camp Prou, ayant leurs chefs dans l’Ouest, étaient également réduits à attendre les événemens.

  1. Pierre Pinchinat, né à Saint-Marc, le 12 juillet 1746, fut envoyé en France, où il reçut une brillante éducation. Il parlait avec beaucoup de facilité et écrivait fort bien. Il revint dans la colonie, en mars 1790, pour prêter à ses frères l’appui de ses connaissances dans leurs réclamations. Il était d’une taille avantageuse et d’un physique agréable, d’un caractère doux, patient, mais ferme. Sa haute intelligence le faisait toujours incliner vers la modération. Il était sincèrement attaché à la France.