mourront peut-être de faim dans le pays le plus fertile de l’univers, en se livrant à l’incurie, à l’imprévoyance, à l’impéritie et à l’incurable paresse de leur caractère…
» Que des hommes qui ont à peine brisé les fers de l’esclavage, soient revêtus indistinctement, le même jour, de toute la puissance politique du droit de cité, sur leurs concitoyens, sur leurs anciens maîtres, sur des hommes dont ils sont les rivaux, sur cinquante mille Français qu’ils pourraient à chaque instant exterminer, en se mettant à la tête d’une armée de six cent mille nègres, leurs véritables concitoyens, j’ose le dire : ce n’est point là une mesure que des législateurs français puissent jamais adopter… Imaginez, Messieurs, que la nation française met dans ce moment une balance entre vos mains. Dans l’un des bassins, je vois cinquante mille blancs ; et dans l’autre j’aperçois sept cent mille noirs ou hommes de couleur. Si vous ne vous hâtez de mettre du côté des blancs les prérogatives de la puissance politique, il n’y a plus d’équilibre…
» Une révolution dans vos colonies ! mais une révolution dans vos colonies en serait l’indépendance, c’est-à-dire l’anéantissement. Une révolution y serait un changement de domination ; elle ferait rentrer tous les esclaves dans la jouissance de leur liberté, tous les hommes de couleur dans l’exercice inouï, mais peu durable, de leurs droits politiques ; et tous les blancs, proscrits par cette insurrection inévitable, dépouillés de leurs propriétés, esclaves de leurs esclaves, n’auraient plus à opter qu’entre l’émigration, la servitude ou la mort… Vous leur subtitueriez des indigènes étrangers à la nation, des hommes qui ne vous sont unis par aucun nœud, ni par l’habitude du climat, ni par les liens du sang, ni par les relations du patriotisme ; des hommes enfin