Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 1.djvu/178

Cette page a été validée par deux contributeurs.

que c’est là le vœu de la raison, del’édit de 1685[1], du décret du 28 mars qu’il ne dépendait pas des législateurs de ne pas prendre ;… que l’assemblée nationale aurait pu repousser la proposition d’une classe intermédiaire et se renfermer dans le sens littéral du décret déjà rendu sur les personnes libres (celui du 28 mars) ; mais qu’elle avait préféré de traiter les représentans des fondateurs des colonies (les blancs, successeurs des flibustiers) comme une mère tendre, qui non-seulement veut le bien de ses enfans, mais se plaît à le faire de la manière dont ils ont contracté l’habitude ; qu’elle a consenti à former la classe intermédiaire que sollicitaient les colons blancs… Elle ajoute et fait remarquer encore, dit Garran, dans cet exposé, qu’en assurant aux colonies l’initiative des personnes non libres, elle leur garantit leurs moyens de culture, le point fondamental et le seul véritablement important… L’assemblée constituante, continue Garran, s’efforçait de justifier ce dernier acte de condescendance, en observant qu’il ne s’agissait que d’individus d’une nation étrangère (les nègres) qui, par leur profonde ignorance, les malheurs de leur expatriation, la considération de leur propre intérêt, l’impérieuse loi de la nécessité, ne pouvaient espérer que du temps, du progrès de l’esprit public et des lumières, un changement de condition, qui, dans l’état actuel des choses, serait contraire au bien général, et pourrait leur devenir également funeste. »

  1. L’édit de 1685 voulait que même les affranchis fussent égaux en droits, privilèges, etc., aux blancs. L’assemblée du xviiie siècle n’accordait donc pas autant que le despote du xviie. Quelle maladresse de la part de cette assemblée, d’avoir cité cet édit de Louis XIV qui condamne ses décrets !