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attendant que de nouvelles lois eussent été substituées aux anciennes, celles-ci continueraient à être exécutées. Or, nous avons fait voir déjà qu’en vertu de l’ancienne législation coloniale, les hommes de couleur ne pouvaient exercer aucun droit politique. De plus, dans la séance du 12 octobre où ce décret fut rendu, l’assemblée nationale interdit toute discussion, lorsque Pétion, Mirabeau et Grégoire voulurent réclamer contre les droits exorbitans que ce décret allait de nouveau conférer à l’assemblée coloniale[1]. Ces défenseurs de la cause des noirs et des mulâtres prévoyaient tous les maux qui allaient naître de l’injustice des colons ; ils voulaient que l’assemblée souveraine de la France imposât son autorité tutélaire pour contraindre ces despotes à être justes : ils ne furent pas écoutés.


Bientôt on apprit en France la tentative d’Ogé et de Chavanne, et le procès qu’ils subissaient. L’assemblée nationale rendit un décret, le 1er février 1791, par lequel « le roi était prié d’envoyer dans la colonie de Saint-Domingue trois commissaires civils chargés d’y maintenir l’ordre et la tranquillité publique, à l’effet de quoi il leur serait donné tous pouvoirs à ce nécessaires, même celui de suspendre, s’ils l’estimaient convenable, les jugemens des affaires criminelles qui auraient été intentées à raison des troubles qui avaient eu lieu dans cette colonie, ainsi que l’exécution de ceux desdits jugemens qui auraient pu être rendus. »

Non-seulement il eût été trop tard pour empêcher la

  1. Rapport de Garran, t. 1er, page 291.