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auraient donné de la résolution aux hommes de couleur des autres quartiers. Mais la défaite d’Ogé porta le découragement parmi eux, même dans le camp Prou.

Immédiatement après avoir terminé ses arrangemens avec ceux des Vérettes, Mauduit partit pour les Cayes, à la tête de quatre cents hommes. Il les débarqua au Port-Salut, le 28 novembre. Poursuivant le plan de modération calculé de Peinier, adopté par Blanchelande, il laissa sa troupe et se porta de sa personne au camp Prou, avec quelques officiers, sans doute pour ne pas s’exposer à une résistance de la part des hommes de couleur. Cependant il leur adressa le discours suivant, empreint de morgue et de menace : « Gens de couleur, leur dit-il, je vous parle au nom de la nation, de la loi et du roi. Vous avez été égarés par de folles prétentions. Vous ne devez jamais espérer de franchir la ligne de démarcation qui vous sépare des blancs, vos pères et vos bienfaiteurs. Rentrez dans le devoir… Je vous porte d’une main la paix, et de l’autre la guerre. »

Rigaud et ses camarades mirent bas les armes. Mais bientôt après, Mauduit opéra l’arrestation de Rigaud et des principaux chefs secondaires de cette troupe, qu’il envoya dans les cachots du Port-au Prince, par ordre de Blanchelande[1].

Là se trouvaient déjà P. Pinchinat, Labastille, J. Rebel, Daguin et quelques autres, emprisonnés par Blanchelande, pour avoir correspondu avec Ogé. P. Pinchinat, natif de Saint-Marc, est devenu le chef politique de sa

  1. Dans son Mémoire, Rigaud prétend que Mauduit leur fit mettre bas les armes, plutôt par la voie de la persuasion que par le développement des forces qui l’accompagnaient. Le fait est que Rigaud agit avec prudence en cette occasion, pour éviter une latte intempestive.