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même peine que Vincent. Il fut exécuté le 10 du même mois. Il paraît qu’il eut la faiblesse de dénoncer beaucoup d’hommes de couleur, si toutefois on peut se rapporter aux procès-verbaux de ses juges, intéressés à y consigner, dans les ténèbres de cette procédure, tout ce qui pouvait motiver l’arrestation et la mort des nouveaux accusés dont plusieurs résidaient dans l’Ouest[1].

Le procès fut fait aux contumax ; et durant plusieurs mois, on exécutait tous ceux qui étaient arrêtés et qui avaient été condamnés à la peine de mort.

Ainsi se termina la glorieuse entreprise d’Ogé.

« Sa conduite, dit Garran, fut imprudente à bien des égards. Il fut vaincu et sacrifié… Quelque opinion donc qu’on puisse avoir sur la témérité des démarches d’Ogé ; si l’on se porte aux premières années de la révolution, si l’on se rappelle que les blancs de la colonie lui avaient montré l’exemple de s’armer les uns contre les autres, et qu’il ne réclamait même les droits les plus légitimes contre des autorités illégales, à 2,000 lieues de la métropole, qu’en se fondant sur les décrets de l’assemblée nationale, on ne pourra refuser des larmes à sa cendre, en abandonnant ses bourreaux au jugement de l’histoire. »

Et encore : « La catastrophe de cet infortuné ne servit pas moins la cause des noirs, que celle des hommes de couleur ; comme si la nature, par une sorte d’expiation, eût voulu du moins attacher à sa mémoire la régénération de l’espèce humaine dans les Antilles. »

  1. Voyez ce que dit Sonthonax aux Débats, tome 3, pages 48 et 50, sur la fausseté de ce testament.