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pu pour remettre la lettre dont vous les avez chargés, pour annoncer des troupes qui étaient prêtes à voler contre nous. S’ils m’ont remis la lettre à M. Lambert, ils y ont été contraints par une force majeure ; leur vigilance mérite des égards et des éloges de votre parti. Ils sont porteurs de la présente. »

« Nous exigeons, disait-il à M. de Vincent, la promulgation du décret du 28 mars : nous nommerons des électeurs, nous nous rendrons à Léogane, nous nous fortifierons, nous repousserons la force par la force, si l’on nous inquiète. L’amour-propre des colons se trouverait insulté si nous siégions à côté d’eux ; mais a-t-on consulté celui des nobles et du clergé pour redresser les mille et un abus qui existaient en France ? »


Examinons ce manifeste d’Ogé, et disons franchement ce que nous en pensons. Le devoir de celui qui étudie l’histoire de son pays et qui s’efforce d’en faire jaillir la vérité, toujours utile à la postérité, consiste à aider cette postérité dans le jugement qu’elle doit porter sur les hommes et les choses. C’est par là qu’il peut recommander son œuvre et inspirer de la confiance en ses propres sentimens. L’impartialité fait le mérite de l’historien : alors même qu’il se trompe dans ses appréciations, le lecteur lui sait gré de sa loyauté.

Nous dirons donc que nous trouvons dans ces lettres d’Ogé une présomption que nous blâmons : le moi humain y apparaît trop ouvertement. Sans doute, c’est le langage de celui qui se fait le chef de son parti ; mais ce langage était-il autorisé par les circonstances ? Réduit à précipiter sa prise d’armes, sans avoir eu le temps de s’entendre avec toute la classe de couleur, à n’avoir sous