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Ainsi procède l’humanité dans sa marche ascendante vers la civilisation. Lorsque les nations se fatiguent des abus de leurs gouvernemens, ce sont toujours les classes supérieures qui, les premières, se mettent au premier rang pour les attaquer et les réformer. Souvent insuffisantes pour obtenir la victoire, elles ne tardent pas à appeler à leur aide les classes inférieures de la société : celles-ci posent alors leurs conditions de concours, ou agissent le plus souvent comme si elles n’avaient aucune arrière-pensée ; et en définitive, elles profitent également de la victoire obtenue, si elles ne se substituent pas, par leur force et leur nombre, par l’effet de la désorganisation momentanée de l’autorité, à la position sociale des classes qui espéraient leur imprimer une direction arbitraire.

Tel a été l’heureux résultat des diverses révolutions opérées dans l’ancienne Reine des Antilles, en dépit des prétentions contraires de la race blanche, trop orgueilleuse, trop préoccupée du maintien de l’oppression séculaire qu’elle avait établie au détriment de la race noire.


Quoique la nouvelle de la convocation des États généraux, en France, eût produit une grande fermentation dans les esprits à Saint-Domingue, principalement dans la classe des grands planteurs, ce fut surtout en apprenant la prise de la Bastille par la population parisienne, que toutes les têtes s’enflammèrent. La révolution était faite en France ; elle commença dès lors dans sa colonie.

Mais, déjà en 1788, les grands planteurs résidans en France avaient fait des tentatives auprès du gouvernement royal, pour obtenir la représentation de la colonie