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l’horizon à l’est, dominées par l’énorme croupe isolée du mont Pécloz[1]. Cet horizon de montagnes est d’une surprenante beauté.

École est un grand et prospère village, dont on s’expliquerait mal le riche aspect si l’on ne savait le rôle de l’émigration dans les Bauges. Dans cette région pastorale, le travail des champs est de peu d’importance ; il se borne à des cultures d’avoine et de pommes de terre nécessitant peu de main-d’œuvre. La garde du bétail dans les hauts pâturages est laissée aux femmes, aux enfants et aux vieillards ; le seul travail considérable est la fenaison, il demande quelques journées en août et les émigrants peuvent venir l’effectuer. Or, la race des Baujus, issue, croit-on, de débris de la domination sarrasine refoulés dans ces hautes vallées, est prolifique : le pays ne saurait nourrir tous les enfants. Ceux-ci, lorsqu’ils sont adolescents, vont donc chercher fortune à Lyon et à Paris, où ils deviennent cochers de fiacre, laitiers, garçons de restaurant ou de café. Paris, surtout, les compte par milliers. Les cochers sont les plus

  1. Pour ces noms savoisiens ou dauphinois en oz ou az, le z, ni la voyelle ne se font sentir. Ainsi, pour le mont Pécloz, on dit Pècle, pour Culoz, Cule ; le grand compositeur Hector Berlioz, né à la Côte-Saint-André, et encore appelé Berlieu par les paysans. Toutefois, les mots en az se prononcent souvent comme un a.