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nous offre de traverser le col, demain, avec les convoyeurs et les mulets du 13e alpins rentrant à Lans-le-Bourg ; l’offre est trop gracieuse pour être déclinée, nous acceptons donc et passons l’après-midi au Val-d’Isère, où je commence cette lettre, après avoir renvoyé à Tignes le guide retenu ce matin.

Au crépuscule nous sommes allés visiter le village ; il est d’une mélancolie profonde, les prés ne sont pas fauchés encore à cause des pluies incessantes, leur floraison apporte un peu de douceur à cette âpre nature. Pas un arbre, quelques choux, des légumes, des pommes de terre, voilà tout ce que donne la culture. Dans le jardinet de l’hôtel, les carrés de laitue, de poireaux et de carottes sont bordés d’edelweiss ; cette plante des hautes cimes s’est complètement transformée, les fleurs sont énormes, certains pieds en ont jusque vingt-cinq. Mais elles n’ont pas le charme des edelweiss sauvages cueillis, là-haut, à la marge des glaciers.

Grâce à la présence du général, le petit village à toute la journée conservé un air de fête ; à l’hôtel on s’est surpassé, la cuisinière a préparé un menu dont chaque plat porte un nom militaire. Les habitants sont venus, mais ils n’osent pas entrer dans la salle à manger, ils restent dans la