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route, des chars portant des troncs de sapin sont conduits par des voituriers enfouis sous de grandes limousines et dont le sauvage aspect s’harmonise bien à celui du paysage. Le torrent et la roule remplissent le fond de la gorge, la route gravissant des pentes régulières, le Furon descendant de chute en chute. À mesure que la route s’élève, le lit du Furon est plus profondément creusé, bientôt c’est une simple fissure où l’œil pénètre rarement jusqu’aux eaux écumeuses.

Le pays est désert ; aux Brets on trouve enfin quelques maisons. C’est demain Pâques, on festinera dans les chalets de la montagne, aussi la diligence distribue-t-elle sur le chemin la viande commandée la veille à Grenoble. Au-dessus des Brets, on commence à trouver la neige ; dans les endroits peu exposés au soleil elle forme des couches épaisses. Nous passons en vue du dangereux défilé du Pas-du-Curé qui conduit à Saint-Nizier. La route est ici creusée en encorbellement, les eaux qui suintent sans cesse du rocher ont formé de longues stalactites de glace, nous passons sous une véritable voûte de cristal. Les rochers se font immenses jusqu’au hameau des Jaux, sous l’église d’Engins, où a lieu le relais.

Le village est sons la neige. L’air est très froid, je descends de l’impériale tout transi. L’auberge