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mètres par métre, la locomotive traîne son convoi, pénètre dans un tunnel d’un circuit presque complet, contournant le vallon des Ripeaux dans lequel se brise un petit torrent.

À la sortie du tunnel, le site a changé. On découvre en entier la partie de la voie que l’on vient de parcourir, la Grande-Chartreuse apparaît maintenant dans toute sa splendeur ; À ses pieds, les toits et les flèches d’église de Grenoble, comme blottis sous les hauts remparts de la Bastille. Mais ce n’est point ce lumineux et prestigieux paysage que l’on admire : le regard revient toujours au Drac, courant au fond de l’abîme vertigineux, entre des campagnes ravinées et grises, et dont le bruit monte jusqu’à nous. Le torrent roule ses eaux entre de larges bancs de gravier, dans un lit qui donnerait passage à un grand fleuve. Soudain, la gorge se rétrécit, les pentes déjà abruptes deviennent à pic, les eaux tout à l’heure divagantes sont réunies dans un chenal étroit. Malgré la beauté de la muraille calcaire de la Moucherolle et l’élégance de la pyramide du mont Aiguille apparaissant à l’horizon, l’œil est invinciblement attiré par cet abîme, profond de 800 mètres, sur les flancs duquel on monte par des corniches et des viaducs hardis. Le schiste noirâtre est, ici, complètement à nu ; cette roche dé-