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soldat, chez l’officier : Si ces hommes m’attendent ou s’ils viennent jusqu’à moi, à brûle-pourpoint, je suis mort. Je tue, mais je suis tué pour sûr. À bout de canon, la balle ne s’égare plus. Mais, si je leur fais peur, ils se sauvent, et ce sont eux qui reçoivent balles et baïonnettes dans le dos. Essayons. Et l’on essaye, et toujours une des deux troupes, si près que l’on voudra, à deux pas si l’on veut, fait demi-tour avant l’abordage.

Le choc est un mot.

La théorie de Saxe, la théorie Bugeaud : « Allez de près à coups de baïonnette et de fusil tirés à brûle-pourpoint ; c’est là qu’il se tue du monde, et c’est le victorieux qui tue, » n’est fondée sur aucune observation. Nul ennemi ne vous attend si vous êtes résolu, et jamais, jamais, il ne se trouve deux résolutions égales face à face. Et cela est tellement connu, senti de tout le monde, de toutes les nations, que les Français n’ont jamais rencontré qui résistât à une charge à la baïonnette.

Les Anglais en Espagne, en marchant résolument au devant des charges en colonne des Français, les ont toujours culbutés.

Blücher, dans ses instructions à ses troupes, rappelle que jamais les Français n’ont tenu devant la marche résolue des Prussiens en colonne d’attaque.

Souwarow ne connaissait pas de meilleure tactique,