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seul résultat des travaux de cette Assemblée, une bonne constitution ; et sans doute nous ne serions pas honorés de leur approbation, si nous leur présentions quelques lois isolées , en abandon- nant la liberté publique.

Le but de toutes les sociétés étant le bonheur général, un gouvernement qui s'éloigne de ce but, ou qui lui est contraire, est essentiellement vi- cieux. Pour qu'une constitution soit bonne, il faut qu'elle soit fondée sur les droits des hommes, et qu'elle les protège évidemment ; il faut donc, pour préparer une constitution, connaître les droitsque la justice naturelle accorde à tous les individus, il faut rappeler les principes qui doivent former la base de toute espèce de société, et que chaque article de la constitution puisse être la conséquence d'un principe. Un grand nombre de publicistes modernes appellent l'exposé de ces principes une déclaration de droits.

Le comité a cru qu'il serait convenable, pour rappeler le but de notre constitution, de la faire précéder par une déclaration des droits des hommes; mais de la placer, en forme de préam- bule, au-dessus des articles constitutionnels, et non de la faire paraître séparément. Le comité a pensé que ce dernier parti présenterait peu d'uti- lité, et pourrait avoir des inconvénients; que des idées arbitraires et philosophiques, si elles n'étaient accompagnées des conséquences, per- mettraient d'en supposer d'autres que celles qui seront admises par l'Assemblée; qu'en n'arrêtant pas déiinitivement la déclaration des droits jus- qu'au moment où l'on aura achevé l'examen de tous les articles de la constitution, on aurait l'avantage de combiner plus exactement tout ce qui doit entrer dans l'exposé des principes, et être accepté comme conséquence. Cette déclara- tion devrait être courte, simple, et précise. C'est donc de la déclaration des droits, considérée comme préambule de la constitution, que l'As- semblée doit d'abord s'occuper, sans l'arrêter dé- finitivement.

Ici, le comité doit faire part de ses vues sur la direction des travaux de l'Assemblée, relativement à la constitution : cet objet est trop important pour qu'on ne réunisse pas toutes les lumières. Il serait in tiniment dangereux de confier à un co- mité le soin de rédiger un plan de constitution, et de le faire juger ensuite dans quelques séances. Il ne faut point ainsi mettre au hasard des délibé- rations précipitées, le sort de 24 millions d'hom- mes; il serait plus conforme à la prudence de faire discuter tous les articles de la constitution dans tous les bureaux à la fois, d'établir un co- mité de correspondance, qui 6e réunirait à cer- taines heures pour comparer les opinions qui pa- raîtraient prévaloir dans les différents bureaux, et qui lâcherait, par ce moyen, de préparer une certaine uniformité de principes.

Comme les articles de la constitution doivent avoir la liaison la plus intime, on ne peut en ar- rêter un seul avant d'avoir bien mûrement réflé- chi sur tous. Le dernier article peut faire naître des réflexions sur le premier, qui exigent qu'on y apporte des changements ou des modifications.

La discussion des articles de la constitution consumera peut-être un temps considérable; mais aucun motif ne doit nous inspirer le dessein d'agir avec précipitation. Le plus grand de tous les mal- heurs auxquels nous puissions être exposés, se- rait d'établir une constitution vicieuse. Mais pour qu'on ne puisse pas nous croire dans l'inertie, pendant que nous agiterons les plus grands inté- rêts, et afin de faciliter à tous les membres de

cette Assemblée les moyens de s'éclairer mutuel- lement, on tiendrait chaque semaine trois séances générales, où l'on discuterait en public les objets qui auraient déjà été soumis à une discussion dans les bureaux. En nous conduisant ainsi, nous réunirions plusieurs avantages, celui de nous con- former aux principes, et celui de profiter des lu- mières de ceux qui attendent de nouvelles ins- tructions pour voter dans cette Assemblée. Ils s'empresseront sans doute de nous communiquer leurs réflexions; et, pendant cet examen, ils pour- ront trouver le temps nécessaire pour obtenir une plus grande liberté, sans que l'activité de l'As- semblée, qui ne doit jamais être suspendue, soit subordonnée à cette considération.

Après la déclaration des droits dont les hommes doivent jouir dans toutes les sociétés, on passe- rait aux principes qui constituent la véritable monarchie, ensuite aux droits du peuple Fran- çais. Les représentants de la nation, en renou- velant solennellement la déclaration des droits du Roi, appuieront son autorité sur des bases inal- térables. On examinerait successivement tous les moyens qui doivent assurer l'exercice des droits respectifs de la nation et du monarque. Le comité aura l'honneur de mettre sous les yeux la prin- cipale division d'un plan de constitution. Si l'As- semblée le désire, il lui présentera incessament le tableau des sous-divisions.

Nous touchons donc au moment qui doit régler la destinée de la France. Puisse votre zèle, Mes- sieurs, obtenir tout le succès dont il est digne 1 puisse une confiance réciproque dissiper toutes les alarmes ! puisse-t-on ne Jamais oublier que tout ce qui est juste et utile, tout ce qui contri- bue au maintien de l'ordre public, importe à la nation, et que nous en sommes tous les défen- seurs! Sans doute les députés de toutes les par- ties du royaume ne s'occuperont plus des anciens droits particuliers qui ne garantissaient pas leurs provinces du joug du pouvoir arbitraire, ils pré- féreront une liberté générale, une félicité com- mune, au triste privilège d'être distingués dans la servitude par quelques faibles avantages. Puis- sent enfin toutes les provinces, par l'organe de leurs représentants, contracter entr'elles et avec le trône une alliance éternelle 1

ORDRE DU TRAVAIL Proposé par le comité.

Art. 1 er . Tout gouvernement doit avoir pour unique but, le maintien du droit des hommes : d'où il suit que pour rappeler constamment le gouvernement au but proposé, la constitution doit commencer par la déclaration des droits naturels et imprescriptibles de l'homme.

Art. 2.. Le gouvernement monarchique étant propre à maintenir ses droits, a été choisi par la nation Française; il convient, surtout, à une grande société; il est nécessaire au bonheur de la France : la déclaration des principes de ce gou- vernement doit donc suivre immédiatement la déclaration des droits de l'homme.

Art. 3. Il résulte des principes de la monarchie, que la nation, pour assurer ses droits, a concédé au monarque des droits particuliers. La consti- tution doit donc déclarer d'une manière précise les droits de l'une et de l'autre.

Art. 4. Il faut commencer par déclarer les droits de la nation Française.

11 faut ensuite déclarer les droits du Roi.