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d’opiner ; la première, en se levant et s’asseyant alternativement et en silence, et après un intervalle suffisant pour compter les votants.

La seconde, que les censeurs recueilleront les voix de ceux qui seront dans leurs quartiers, en feront le rapport au président, qui, sur ce résultat, prononcera ce que la pluralité aura décidé.

Plusieurs membres lisent des projets qui ne sont pas discuiés.

On discute d’abord trois points qui ont frappé l’Assemblée :

1° Condamnera-t-on les spectateurs à se réfugier dans les tribunes ?

2° Se formera-t-on par bureau ?

3° Laissera-t-on au bureau toute l’autorité que le règlement lui attribue ?

Sur la première question, un membre pense que c’est revenir contre le vœu général de l’Assemblée, qui veut se placer sans cesse sous les yeux de la nation. Sur la seconde, on dit qu’il est impossible de se former en vingt bureaux, attendu que le local n’est pas assez considérable ; qu’il n’y a que neuf chambres, même trop petites, pour y recevoir trente personnes ; que cela sera dangereux en ce que telle personne qui a confiance en telle autre ne pourra pas profiter de son avis, en ce qu’une bonne opinion ne sera concentrée que dans une décision de trente personnes. D’un autre côté, l’on prétend qu’il n’est pas du tout impossible de se diviser en bureaux ; que si c’est trop de vingt bureaux, on n’en établira que douze, e’c que la salle et les Chambres suffiront ; que l’on a déjà eu un exemple que les communes se sont rassemblées dans la salle par gouvernements, et que le tumulte n’a nullement troublé cette division ; que, loin de priver les membres de l’Assemblée des opinions, elle lui servira à les étendre, en ce que souvent telle personne qui se tait, ou par défaut d’organe et de poumons assez forts pour se faire entendre de six cents personnes, ou parce qu’elle n’a pas l’usage de la parole, exposera son avis avec plus de tranquillité dans une assemblée de trente personnes, et que cela est si vrai qu’il n’y a eu encore jusqu’ici que cinquante personnes qui aient pris la parole ; et qu’après l’assemblée particulière de division, tout le monde sera libre encore de parler dans l’Assemblée générale. Sur la troisième question il n’y a que quelques personnes qui se plaignent de voir le bureau érigé en dictateur, maître de rejeter ou d’admettre les motions, et par là de décider en quelque sorte du sort de la nation.

M. Malouet prend la parole. Après avoir démontré l’avantage des bureaux, après avoir dit qu’on devait donner à chaque bureau une matière particulière à discuter, à l’un les impôts, à l’autre le commerce, àcelui-cila justice, à celui-là l’agriculture, etc., il termine par dire que les inconvénients de n’avoir pas de règlement sont si grands qu’il faut adopter provisoirement le règlement, et passer préalablement à son examen.

Plusieurs membres sont de son avis. Cependant, après bien des débats, après que M. le Doyen eut fait tous ses efforts pour ramener les esprits à cet objet, l’on réduisit l’exécution provisoire à l’article II du règlement, c’est-à-dire à la formation des bureaux.

On reprend la délibération sur l’adresse du clergé.

Plusieurs membres pensent qu’il faut députer à l’instant au Roi pour 1 instruire de la délibération

des communes ; d’autres qu’il faut lui faire parvenir une adresse.

11 s’élève une discussion très-intéressante.

Un des membres soutient qu’il faut demander l’exécution de la déclaration de 1709, qui, donnée dans un temps de disette, porte que tous les propriétaires, soit laïques ou ecclésiastiques, nobles ou roturiers, donneront un état des grains qu’ils ont dans leurs greniers ; qu’ils ne seront autorisés qu’à garder ce qui leur est nécessaire pour les besoins de leur famille ; que le reste sera conduit au marché et à un prix déterminé ; qu’il faut aussi demander l’exécution des lois canoniques, qui ordonnent que les bénéficiers restitueront aux pauvres les revenus des bénéfices, à l’exception de ce qui est nécessaire pour leur subsistance.

Un autre ajoute qu’il faut se retirer par devers M. le contrôleur général, et lui demander les états faits tous les nuit jours des grains importés dans le royaume.

11 n’est pris aucune résolution, et le président lève la séance.

Suite des conférences en "présence des commissaires du Roi.

Une grande partie de cette séance est consommée en de longs débats sur le procès-verbal dont les commissaires de la noblesse ne veulent pas que l’authenticité soit constatée, même par la signature d’un secrétaire, toujours sur le motif par eux précédemment allégué.

M. le garde des sceaux demande aux commissaires 1 des trois ordres quel est le parti que leurs Chambres ont pris sur le rapport à elles fait de l’ouverture proposée par les ministres du Roi.

Les membres du clergé disent que leur Chambre a accepté avec empressement et reconnaissance l’ouverture faite au nom du Roi.

Les commissaires de la noblesse font lecture de la délibération prise le jour même par leur Chambre.

Ceux des communes rendent compte de la délibération prise par l’Assemblée de leurs députés, d’attendre, pour délibérer avec une plus grande maturité et une plus grande instruction dans une circonstance aussi importante, la fin des conférences et la clôture du procès- verbal.

Un membre des communes dit qu’il leur reste à exposer leurs moyens de droit ; que, sur cette partie, il sera très-court. MM. de la noblesse annoncent qu’ils ne veulent plus rien répondre.

Il est impossible de prétendre que les pouvoirs des députés aux Etats généraux puissent avoir d’autres juges naturels que le corps entier des représentants de la nation. Quelle serait l’autorité d’une délibération prise par des hommes qui n’auraient pa3 le droit de délibérer ? Le concours des hommes dénués de ce droit, à un acte aussi important, serait l’usurpation de la plus inaliénable des autorités. Chaque assemblée de bailliage donne aux députés des trois ordres qu’elle envoie aux Etats généraux un mandat qui, soit formel, soit tacite, n’en est pas moins spécial, pour vérifier à quel titre les représentants des trois ordres, dans les autres bailliages, viennent concerter avec eux les arrangements pour l’intérêt public. Tous sont dépositaires à cet égard du droit qu’a la nation d’empêcher que ceux qui n’ont pas sa confiance usurpent l’influence qu’elle doit assurer. Tout droit confié par autrui, et, plus encore,