Page:Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première Série, Tome VIII.djvu/140

Cette page n’a pas encore été corrigée

Sur la motion de M. le duc du Chatelet, il

est décidé à l'unanimité de députer au Roi et à la Reine, pour leur témoigner la part que l'on prend à leur douleur.

Un commissaire rend compte de la conférence de la veille, et dit que les commissaires de la noblesse ont refusé de signer le procès-verbal, parce qu'ils ont trouvé que les raisonnements du tiers-état y sont présentés avec plus de force que les autres, et qu'on s'y est servi du mot de communes.

On s'occupe ensuite du jugement des deux députations d'Amont. Après de très-longues dis- cussions, la première, qui a déclaré qu'elle ne veut prendre que les Etats généraux pour juge, est déclarée nulle.

COMMUNES.

M. le Doyen en ouvre la séance par rendre compte de la mission dont il a été chargé. Il dit, qu'en exécution de l'arrêté de la veille, il s'est adressé à quelqu'un qui a occasion de voir le Roi, et qui a bien voulu se charger de lui en donner com- munication ; il lui a répondu que Sa Majesté était disposée à voir le doyen des communes, mais que, suivant les usages, il voulait qu'il s'adressât par les voies ordinaires, c'est-à-dire qu'il fût an- noncé par M. le garde des sceaux. En consé- quence, M. le doyen s'est rendu avec lui chez le Roi, qui était sorti. M. le garde des sceaux prit alors- sur lui- d'écrire au Roi. M. Bailly étant re- tourné à la chancellerie à dix heures du soir, lut un billet du Roi conçu en ces termes :

« Il m'est impossible, dans la situation où je me trouve, de voir M. Bailly ce soir ni demain, ni de fixer l'instant où je pourrai recevoir la députation du tiers-état : montrez mon billet à M. Bailly pour sa décharge. »

Un silence de quelques minutes suit le rapport que vient de faire M. le doyen.

M. le Doyen fait part ensuite des deux objets qui doivent occuper la séance; ces objet sont : le rapport des dernières conférences et le règle- ment provisoire.

M. Dupont rend le compte le plus circons- tancié de la dernière conférence. Ensuite il de- mande que l'Assemblée veuille bien déclarer si elle consent ou non que le procès-verbal rédigé par ses commissaires soit communiqué à ceux des deux autres ordres.

Il ajoute : La conférence qui doit avoir lieu ce soir suffira pour épuiser la matière. D'un autre côté, il a été arrêté, le 30 mai, que les confé- rences continueront jusqu'à ce que la députation des communes ait été reçue par Sa Majesté. La mort de Mgr le dauphin, dans la nuit précédente, peut retarder encore l'admission de cette députa- tion. Je supplie donc l'Assemblée de vouloir bien s'expliquer sur la continuation ou la clôture des conférences dès ce soir même.

D'une part, on soutient que les motifs qui ont déterminé l'arrêté du 30 mai subsistent toujours, qu'ils n'ont rien perdu de leur force, et que par- conséquent les commissaires ne peuvent être au- torisés à clore les conférences, tant que la députa- tion d es communes n'aura pas été reçue par le Roi ; d'un autre côté, on prétend que les circonstances ne sont plus les mêmes, et que des considérations

majeures s'opposent à la continuation des con- férences, devenues inutiles et dangereuses même.

M.*** député du Berry. Je propose de former trois bureaux, dont chacun sera composé de dix personnes choisies par le gouvernement, pour procéder, dès le lendemain, à l'examen et à une vérification provisoire des pouvoirs qui demeu- rera définitive, si les ordres privilégiés persistent dans leur refus de se réunir aux communes.

Un député de Bretagne veut que la vérification soit définitive, et que l'Assemblée se constitue.

Sur la communication qu'ont demandée MM. de la noblesse, on prétend qu'elle doit être refusée. Cet avis est discuté, et successivement appuyé et combattu. L'avis de ceux qui le combattent est motivé par ce dilemme : ou le procès-verbal est exact, et alors on ne peut en refuser la communi- cation, puisqu'il pourra être argué de fausseté ; ou il ne l'est pas, et alors il faut rétablir sa vé- racité.

M. le Doyen présente les deux questions sui- vantes : Gommuniquera-t-on,ou non, à MM. de la noblesse et du clergé les procès-verbaux des conférences, rédigés par les commissaires des communes?

Laissera-t-on à la prudence de ces commis- saires de continuer les conférences, tant qu'ils le jugeront nécessaire?

Après quelques débats, on recueille les suffra- ges par l'appel nominal, et les deux questions sont décidées affirmativement.

On charge M. le doyen de présenter à Leurs Majestés l'expression de la profoude douleur dont la mort de Mgr le dauphin a pénétré l'Assem- blée.

Suite des conférences en présence des commissaires du Roi.

A l'ouverture de la séance , les commissaires des communes demandent l'exécution de l'arrêté du 30 mai, en vertu duquel Je procès-verbal doit être signé par le secrétaire.

Les membres de la noblesse allèguent un nouveau refus de leur Chambre, d'après lequel, si le mot communes se trouve dans le procès- verbal, ils ne peuvent l'approuver ni le laisser approuver par un secrétaire.

Un des commissaires de la noblesse cite un passage de Tacite pour prouver que, de son temps, on délibérait par ordre. — Un des com- munes répond qu'il prouvera qu'il n'y a au- cun rapport entre les grands de Tacite et ceux de ce temps-ci . — Un autre établit qu'il n'y avait point d'ordres parmi les Francs; que la double représentation est une justice nullement contraire aux anciens usages; qu'elle a eu lieu lors des Etats généraux de 1356.

M. le garde des sceaux rappelle les faits tels qu'ils ont été convenus. Il ajoute qu'il ne s'agit ici que de constater et d'attester; un secrétaire peut remplir cette fonction. MM. du clergé et de la noblesse feront au procès-verbal leurs obser- vations et corrections; et, après qu'il aura été reconnu par les commissaires des trois ordres, la signature du secrétaire suffira pour le cons- later.-

La justesse de cette observation étant reconnue unanimement, sur le désir des commissaires des trois ordres que le secrétaire fût pris hors de