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15G0, 1576, 1588 et 1614 portent le témoignage

Sue la vérification des pouvoirs y fut faite par or- re. A l'autorité de ces Etats généraux se joint celle des Etats antérieurs.

« On a prétendu que les Etats de 1483 avaient approuvé une vérification commune, et on croit pouvoir le prouver parce que ces Etats paraissent avoir délibéré par tète; mais il est au moins très- douteux que cette forme de délibération ait été adoptée par ces Etats. Masselin nous apprend

3u'ils furent divisés en six nations; mais il nous it aussi que ce partage ayant paru offrir des in- convénients, il parut qu'il conviendrait que les voix fussent pris'es par tête, et non suivant l'usage observé jusqu'alors, ce qui fut rejeté. La compo- sition de ces Etats ôte d'ailleurs à l'exemple qu on en voudrait tirer toute sa valeur. Masselin dit que le tiers-état n'avait qu'un nombre de représen- sentants égal à ceux des autres ordres. Dès lors le tiers n'avait pas, sur les vérifications des pou- voirs contestés, l'influence qu'il aurait aujour- d'hui.

« Si, des Etats de 1483, on remonte à ceux de 1356, on trouve, dans les deux procès-verbaux de ces Etats, qu'après leur ouverture les autres séan- ces furent tenues aux Gordeliers, en trois lieux divers, pour chacun des trois ordres.

« On a objecté à la roblesse que si les anciens usages doivent servir de guides, ils devaient être observés en tous points : or, 1° pendant ces tenues d'Etats généraux , lorsqu'il y avait une difficulté sur l'admission d'une députation, le Roi, en son conseil, la jugeait ; 2° lors de la convocation des Etats de 1614, les nobles possesseurs de fiefs fu- rent seuls convoqués et électeurs.

c Si, en quelques occasions, le Roi, en son con- seil, a jugé des députations contestées, les Etats ont fortement réclamé contre ces sortes de juge- ments. Ils ont revendiqué l'autorité suprême de chaque Chambre sur les membres qui la compo- saient. Les Etats de 1588, entre autres, offrent plusieurs réclamations de ce genre.

« Quant à la convocation des seuls possesseurs de fiefs, le fait n'est nullement établi. Les assigna- tions données par les baillis aux possesseurs de fiefs ne font pas preuve, parce que, outre les assi- gnations particulières, il y a une autre forme de citation par affiches, commune aux nobles et aux possesseurs de tiefs. Dans la liste des députés de la noblesse, en 1614, on en trouve deux, dont l'un ne porte aucun titre de seigneur de fiels, et dont l'autre est simplement qualifié d'écuyer. »

Aux raisonnements faits pour écarter aujour- d'hui l'autorité de l'usage, et pour établir la né- cessité de la vérification en commun, M. d'Antrai- gues répond :

« Nous n'avons que la même puissance qui a toujours appartenu aux Etats généraux. Si les pré- cédents eu ont mal usé, nous devons en faire un meilleur usage et ne pas faire de simples doléan- ces; mais pour faire mieux, la vérification com- mune n'est pas nécessaire; notre mission n'est pas d'établir une nouvelle constitution, mais de rétablir la constitution.

« Il est vrai qu'il importe à chaque ordre que chacun de ceux qui le composent ait un pou- voir légal; mais cette connaissance leur serait donnée par la communication du travail de cha- que Chambre sur la vérification des pouvoirs. Le député seul contesté doit être jugé par son ordre exclusivement. Il est vrai que la députation en- tière offre plus d'obstacles; c'est le cas de pren- dre un moyen conciliatoire, en nommant des com- missaires pour en faire l'examen en commun, afin

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que d'un rapport uniforme fait ensuite à chaque ordre il résulte un décret semblable. »

Avant d'entrer dans la discussion , les com- missaires des communes représentent qu'étant chargés parleurs commettants de faire et de rap- porter un procès-verbal parfaitement exact de la conférence qui va avoir lieu, ils proposent d'é- crire journellement les conférences et de les signer.

Les commissaires du clergé et de la noblesse disent qu'ils n'ont, à ce sujet, aucun pouvoir de leurs ordres. Après avoir débattu cet objet, l'ar- rêté suivant est adopté par les commissaires des trois ordres.

« 11 sera rédigé par MM. les commissaires des communes un procès- verbal sommaire des con- férences à chaque séance. Ce procès-verbal sera lu par le secrétaire à l'ouverture de la séance sui- vante. Si MM. de l'église et de la noblesse y re- marquent quelques inexactitudes ou omissions, elles seront corrigées ou réparées. Chaque séance du procès-virbal sera, en présence de l'Assemblée, signée de tous MM. les commissaires du tiers-état

3ui en ont la charge spéciale, et signée en outre u secrétaire. Au moyen de ces signatures, le procès- verbal sera reconnu authentique et avoué de tous les commissaires du clergé, de la noblesse et du tiers-état. »

La discussion s'ouvre sur le mémoire de M. d'An- traigues. Un membre des communes offre d'en examiner successivement les diverses proposi- tions. Eu réponse à la partie du mémoire relative à ce qui s'est passé dans les précédents Etats gé- néraux, il dit qu'il ne pense pas que de simples usages, ou plutôt les citations de quelques faits puissent avoir force de loi contre les droits les plus certains d'une nation; qu'il ne se refuse pas cependant à parler des faits avant d'invoquer la raison, mais que c'est sans entendre la subordon- ner à ces discussions historiques.

Les usages des Etats généraux cités n'ont point été uniformes; aucun d'eux n'est conforme au système actuel de MM. de la noblesse. L*es procès- verbaux de 1560 n'offrent aucune trace, aucun in- dice sur la vérification des pouvoirs. Dans ceux de 1576, 1588 et 1614 on trouve que les pouvoirs ont été examinés le plus souvent par gouvernements. S'ils l'ont été quelquefois dans l'Assemblée de cha- que ordre, les décisions n'ont été considérées que comme des arbitrages, et ne tenaient leur validité que du consentement des parties : sur la résis- tance d'une d'entre elles, l'affaire était portée au conseil du Roi. Il résulte d'uue multitude de titres que les pouvoirs ont été jugés par le Conseil, non- seulement avant, mais après I ouverture des Etats généraux. On ne faisait dans les Chambres qu'une vérification matérielle, une simple lecture des pouvoirs; le jugement des contestations était porté par le Conseil du Roi. La noblesse n'ayant point eu dans les Etats généraux précédents la faculté de juger les pouvoirs, elle ne peut, pour l'exercer aujourd'hui, s'autoriser de l'ancien usage. Cepen- dant, la vérification des pouvoirs par les Etats généraux eux-mêmes est une partie essentielle de leur liberté. Il est sensible que cette fonction, exercée par le conseil dans les précédents Etats généraux, ne saurait être reprise, à son défaut, que par l'Assemblée nationale.

Un de MM. les commissaires du Roi (M. Necker) dit que le Roi n'a point renoncé au droit de vé- rifier.

Un de MM. de la noblesse dit que le droit des nobles est d'être jugés par leurs pairs ; que la pré- tention du tiers de connaître les députés de la no-