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Ghassebœuf deVolney, Legrand, Redon, Viguier, Salomon de Saugerie, Bergasse et Barnave.

M. Dulau, archevêque d'Arles, prend la pa- role ; il annonce, au nom du clergé, le désir de contribuer au rétablissement de l'harmonie entre les ordres, son intention de supporter tous les impôts et toutes les charges de l'Etat dans la même proportion et de la môme manière que tous les autres citoyens. Il ajoute que le clergé n'a pas cru devoir prendre do résolution sur l'objet de la vérification des pouvoirs, lorsqu'il a été instruit que les deux autres ordres ont, sur cette matière, des opinions différentes.

M. le duc de Luxembourg expose que le vœu de contribuer également à toutes les imposi- tions est exprimé dans les cahiers de la noblesse, et que ce vœu est aussi certain qu'irrévocable. Il manifeste aussi le désir de voir une paix fra- ternelle régner entre les ordres.

M. Target dit que les communes sont animées du même esprit et qu'elles forment les vœux les

F lus ardents pour l'établissement de la concorde, assanl ensuite à l'objet de la conférence, il ob- serve que les membres qui y sont envoyés n'ont à s'occuper que de la question relative à la vérifi- cation des pouvoirs en commun, et que la né- cessité de cette vérification commune est fondée sur ce que les pouvoirs des députés de toutes les classes ayant pour but l'établissement et la défense des droits et des intérêts de la nation, il est évident que ces pouvoirs doivent être exa- minés, reconnus et jugés par les représentants de la nation entière. Il invite MM. du clergé et de la noblesse à faire connaître les objections qu'ils croient pouvoir opposera une vérilé aussi claire.

Les commissaires de la noblesse disent que, simples mandataires, ils ont cru devoir suivre les usages pratiqués dans les derniers Etats géné- raux. Us rappellent qu'en 1614 la vérification des pouvoirs s'est exécutée par ordres, et ils montrent la crainte que la vérification des pou- voirs en commun n'entraîne l'établissement du vote par tête en Assemblée générale.

Les membres des communes répondent que c'est en Assemblée générale qu'il faut examiner si les formes des derniers Etats généraux sont bonnes, et si leur observation est applicable aux circonstances actuelles ; que les raisons qui éta- blissent la nécessité de faire la vérification des pouvoirs en commun sont décisives par elles- mêmes, et indépendamment de la forme d'opiner qui sera adoptée par les Etats généraux. Entrant ensuite dans l'examen des usages, ils font re- marquer que si en 1614 les pouvoirs ont été vé- rifiés séparément, ce n'a été qu'un examen pro- visoire; mais que sur tous les pouvoirs contestés, la décision définitive avait été renvoyée au con- seil du Roi; que sans doute il n'est pas dans l'intention de MM. de la noblesse de porter au conseil la connaissance de ces contestations.

MM. de la noblesse en conviennent sans diffi- culté; ils reconnaissent que les Etats de 1614 sont tombés, à cet égard, dans une erreur.

MM. des communes observent que, puisqu'on est réduit à reconnaître qu'il y a au moins une erreur dans les anciens usages, on peut bien re- connaître qu'il y en a deux, et que la vérification séparée des pouvoirs en est une. Puisqu'on s'est trompé en allant au conseil du Boi, il s'ensuit qu'il faut y substituer un tribunal qui soit un ; or, ce tribunal ne peut se trouver que dans la

représentation nationale assemblée tout entière MM. de la noblesse objectent qu'en 1588 là vérification des pouvoirs s'est faite aussi séparé- ment, et qu'on ne voit point qu'à cette époque le conseil du Roi ait jugé les contestations sur les pouvoirs.

MM. des communes font sentir l'impossibilité de se prévaloir de ce qui s'est fait en 1588,- au milieu des orages civils; ils se réservent au sur- plus de vérifier le procès-verbal de ces Etats ; ensuite ils disent que, puisque MM. de la no- blesse leur donnent l'exemple de remonter des derniers Etats à ceux de 1588, ils se croient au- torisés eux-mêmes à s'élever plus haut encore et à examiner ce qui s'est pratiqué dans les Etats de Tours en 1483. On y voit que toutes les opé- rations s'y sont faites en commun : d'abord en six bureaux, composés des députés des trois ordres qui préparaient et discutaient les objets de délibération; ensuite, pour les résolutions définitives, par des Assemblées générales. Ces Etats n'ont eu qu'un seul orateur et un seul ca- hier ; donc il est évident que la vérification des pouvoirs n'a pu être faite qu'en commun.

La division des ordres, continuent-ils, n'a commencé qu'en 1560, époque où la fermentation des esprits, les haines et les partis régnaient déjà dans une grande force. Gependaut il est douteux si la vérification des pouvoirs s'est faite séparé- ment; il n'en existe aucun procès-verbal ; l'on voit même que le clergé a protesté contre la séparation des Chambres.

Un membre de la noblesse prétend qu'en 1356 les pouvoirs ont été vérifiés séparément. Il lui est répondu que dans les Etats de 1536 les ordres se sont tantôt réunis et tantôt séparés ; que cette Assemblée ne s'étant fixée à aucun principe établi de délibération, et le procès-verbal n'exis- tant pas, il est impossible de savoir quelle a été la forme des vérifications.

D'après cette discussion qui prouve combien l'autorité des faits est peu concluante sur ce point, MM. des communes invitent MM. delà no- blesse à vouloir bien consulter les règles de la raison.

La raison dit à tout le monde que les représen- tants d'une nation, chargés de concourir à l'œuvre commune de la régénération publique, doivent se connaître les uns les autres et juger leurs titres respectifs ; que les députations faites parles trois ordres réunis dans les baillages (et il y en a plu- sieurs de ce genre) doivent bien évidemment être jugées par l'Assemblée générale des députés de l'Eglise, de la noblesse et des communes.

D'ailleurs l'état des choses est entièrement dif- férent de ce qu'il était en 1614. Alors chaque or- dre se bornait à faire et à présenter des doléances particulières qui pouvaient ne pas exiger un tra- vail commun, et pour lesquelles la connaissance des pouvoirs des députés de chaque classe était indifférente aux autres. Aujourd'hui tous les dé- putés sont chargés par leurs cahiers de l'honorable fonction de concilier tous les droits de la nation avec la puissance royale. A des travaux si diffé- rents, il est impossible d'appliquer l'observation de mêmes formes ; il est impossible que la nation soit indifférente à la validité du titre de ceux qui vont exercer pour elle une partion de la puissance législative.

MM. de la noblesse se retranchent encore der- rière l'autorité des usages. L'un d'eux déclare qu'il faut consulter également et la raison et le dernier élat. Sur le dernier état, il soutieut tou-