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égard pur les ordres séparés ; que c’est dans cet esprit, et pour accélérer la vérification définitive des États généraux, qu’elle préparerait ce travail par ses commissaires, après avoir reçu toutefois la réponse de MM. du clergé et de la noblesse ; qu’elle désirerait d’autant plus la réunion des deux premiers ordres, qu’elle est impatiente de concourir, par une députation des États généraux, aux hommages et aux remercîments respectueux que les représentants de la nation doivent s’empresser de porter au pied du trône. Avant de réitérer mes instances pour que vous veuillez bien, Messieurs, prendre en considération ce projet d’arrêté, qu’il me soit permis de vous présenter une dernière réflexion. Le vœu annoncé généralement d’opiner par tête et non par ordre doit sans doute être exprimé et soutenu par toutes les raisons que l’intérêt national peut suggérer ; mais, en professant le principe, en consacrant le droit des Etats généraux d’opiner par tête quand ils le jugent convenable, n’est-il pas de notre devoir d’en éviter la discussion, jusqu'à ce que l’exercice de ce droit devienne indispensable ?

Or, je suppose que par des communications amiables entre les ordres, on put convenir et arrêter les opérations les plus salutaires, nous serait-il permis d’éloigner, par des contestations anticipées, le bonheur que nous ne saurions trop nous hâter de procurer à la France, lorsque le Roi lui-même se montre si impatient d’y concourir ? Si, au contraire, fidèles à nos devoirs, et constamment animés du généreux amour de la patrie, nous n’avons d’autres plans que ceux qui peuvent assurer la liberté et la félicité publique, et si ces plans éprouvent quelque contradiction dans les autres ordres, avec quelle force, quel avantage ne ferions-nous pas valoir alors le vœu général de l’opinion par tète ? Plus nous en aurons éloigné modérément la discussion, plus nous serons puissants, Messieurs, dans cette réclamation, par l’empire de la raison, par celui de la voix publique, et, pour tout dire enfin, par celui de la nécessité.

Ah ! Messieurs, j’ose encore vous le répéter, la France impatiente nous attend et l’Europe nous regarde. Malheur à nous, si nous prenons la chaleur pour le courage et la prudence pour la faiblesse, et si, nous livrant dès le début à de vaines discussions, nous n’allons par la voie la plus droite et la plus sûre au bien général qu’il nous est facile d’opérer avec de la modération et de la fermeté !

M. le comte de Mirabeau combat fortement cette opinion. Il représente que les députés des communes ne peuvent faire aucune députation tant que les pouvoirs ne sont pas vérifiés ; il fait valoir les avantages d’une inactivité entière dans de pareilles circonstances.

En conséquence, l’Assemblée reste dans l’inertie qu’elle a montrée la veille. On ne prend point de délibération ; les six personnes les plus âgées sont chargées de maintenir l’ordre.

M. Mounier présente un parti mitoyen qui, sans compromettre les communes, peut faire connaître, quoique inofficiellement, les intentions des deux ordres privilégiés ; il consiste à permettre à ceux qui le voudraient d’aller individuellement, et sans mission expresse de l’Assemblée, vers le clergé et la noblesse, pour engager les membres de ces ordres à se réunir aux communes, conformément à l’invitation du Roi, et pour les assurer que ces communes attendront que cette réunion soit opérée avant de se livrer à aucun travail.

Un membre appuie cette motion. Il ajoute qu’un discours de M. l’archevêque de Vienne annonce que le clergé est déjà disposé à se réunir aux communes.

La motion de M. Mounier est adoptée à une très-grande majorité.

Douze membres vont dans les Chambres de la noblesse et du clergé. De retour ils annoncent qu’ils n’ont trouvé dans la Chambre de la noblesse que les commissaires que cet ordre a nommés pour la vérification de ses pouvoirs ; que les commissaires les ont prévenus que les membres composant l’ordre de la noblesse s’assembleront le lundi 11.

Quant au Clergé, l’orateur des douze membres des communes annonce que cet ordre est assemblé, et que le président a répondu que le clergé allait délibérer sur ce qui lui était proposé. Une heure après, MM. les évêques de Montpellier et d’Orange et quatre autres ecclésiastiques, entrent dans la salle.

M. de Malide, évêque de Montpellier. Les députés du clergé ont pris en considération la demande que vous leur avez faite ; ils ont décidé qu’ils nommeraient incessamment des commissaires qui, réunis à ceux qui seraient élus dans la noblesse et les communes, pourront s’occuper de la question de savoir si les pouvoirs devront être vérifiés en commun.

Les membres du clergé se retirent.

Plusieurs débats ont lieu sur la décision que le clergé propose de soumettre à des commissaires.

Plusieurs membres la trouvent d’une trop grande importance pour adopter cette disposition. — Aucune décision n’est prise.

La séance est levée.





ÉTATS GÉNÉRAUX.


Séance du vendredi 8 mai 1789.



CLERGÉ.


Le clergé emploie cette séance à nommer les commissaires chargés de la vérification des pouvoirs. Cette nomination est interrompue par la proposition de nommer une commission conciliatoire proposée la veille.

On l’indique pour le lendemain à la pluralité des voix.

La séance est levée.

NOBLESSE.


La noblesse ne s’est pas assemblée.

COMMUNES.


A l’ouverture de la séance, un membre fait la motion de déposer sur le bureau les listes séparées des députés de chaque bailliage.

Cette motion est adoptée, et aussitôt les listes sont déposées.

L’inactivité des communes est toujours la même ; cependant divers députés proposent de prendre des délibérations tendant à terminer les causes cachées de l’état actuel des choses.