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[1re Série, T. Ier ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Introduction.]


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pour apprendre par quelles façons il s’en pourra démêler, et se tirer hors de la nécessité présente, usant en cela d’un procédé qui tourne à la gloire de sa personne sacrée, et de ceux qui ont l’honneur d’opiner en ses secrètes résolutions. L’avis qu’il vous demande n’est que votre consentement en des choses qui dépendent nuement de Sa Majesté.

« Il demande d’être secouru, non pour s’en prévaloir, mais parce que la sûreté publique le requiert ; sa bonté ne voulant se servir d’aucun remède qu’on lui propose, si cette assemblée, pleine des plus sages et prudents hommes du royaume, n’en convient avec lui ; étant si éloigné de faire chose qui puisse fouler son peuple, qu’il l’a déchargé de six cent mille livres par le brevet de la taille de cette année, qu’il pouvait augmenter autant qu’il eût plu a sa souveraine autorité.

« Il est vrai que cette gratification a déplu à quelques personnes mal intentionnées, lesquelles, pour ne paraître en public auteurs des calomnies, vont disant à l’oreille les uns aux autres qu’on a chargé le peuple d’ailleurs, et par ce moyen veulent détruire la grâce du bienfait de Sa Majesté. Si leur volonté était bonne, ils pourraient parler hautement, et dire leur pensée en cette célèbre compagnie, afin d’avoir des preuves hors de toute exception, pour faire châtier sévèrement les auteurs de cette mauvaise action comme ils le méritent ; cela étant du tout contraire aux volontés du roi, qui peut et ne veut pas que l’on augmente charges quelconques sur son peuple, non obstant que ses finances soient éloignées du courant, et que trente millions de livres ne l’y puissent remettre ; et afin de vous le faire reconnaître je vous dirai en peu de mots qu’il plut au roi me mettre en charge au commencement de juin ; n’ayant trouvé dans l’épargne aucun fonds pour soutenir la dépense du mois, je suis obligé d’ajouter à la demi-année que j’ai exercée.

« M’étant enquis quelle recette et dépense étaient à faire durant le reste de l’année, j’appris qu’il n’y avait plus rien à recevoir, et que même la recette de l’année 1627 était bien avant entamée, et que le quartier de janvier était entièrement mangé, et qu’on avait commencé de lever sur celui d’avril ; que les fermiers généraux des aides avaient prêté un million de livres, et les sous-fermiers cinq cent mille livres, pour s’en rembourser aux quatre quartiers de l’année et sur les deux premiers de la suivante ; que les cinq grosses fermes étaient affectées à Charlot pour son remboursement des grandes avances qu’il avait faites. De même est-il de la ferme des gabelles de Languedoc à Coulanges, la ferme générale des gabelles à Blois, à cause d’un million qu’il avait avancé pour le payement des rentes dont Feydeau était demeuré redevable.

« Ainsi je trouvai toute la recette faite et la dépense à faire : car toutes les garnisons pressaient d’être payées de leurs soldes des années 1625 et 1626. Les armées de la campagne demandaient leurs montres de novembre et de décembre 1625, et celles de l’année 1626 ; jusqu’alors les payes des deux années dues aux garnisons se montaient à cinq millions de livres, suivant l’état, à raison de deux millions cinq cent mille livres par an. Que s’il s’en est trouvé qui aient touché quelque chose, il y en avait aussi d’autres qui demandaient trente mois de solde.

« Pour les armées de la campagne, il se trouve que le roi payait, tant en Italie et en Valteline qu’en France, quatre-vingt onze mille hommes de pied et six mille chevaux, dont la solde revenait par mois à plus de deux millions de livres ; et pour huit mois, il faillait plus de seize millions de livres, à quoi ajoutant les cinq millions des garnisons, le tout revenait à près de vingt-deux millions de livres, comme il se peut justifier par les états du roi et par les certificats que j’en ai tirés des trésoriers de l’extraordinaire des guerres, pour mettre l’épargne en quelque ordre de compte.

« Les gratifications que le roi fait, réduites sur le pied de quatorze cents et tant de mille livres, étaient toutes à payer durant les deux années, qui font environ trois millions de livres. Tous les appointements des officiers de la couronne, ceux de MM. du Conseil, des domestiques de la maison du roi et des compagnies souveraines, avec les pensions étrangères, étaient à payer, qui se montent à plus de deux millions de livres.

« Encore est-il dû cent vingt mille livres de reste du mariage de la reine d’Angleterre ; six cent mille livres à MM. des États des Provinces-Unies, que le roi leur a promis, et autres dettes.

« Sur toutes lesquelles choses j’ai fait payer cent quarante mille livres de gratifications en assignation ; douze cent tant de mille livres pour trois mois donnés aux garnisons ; cent cinquante mille livres dont j’ai assigné le roi de Danemark ; cinq cent mille livres pour les mezades de M. de Savoie que j’ai fait assigner. Plus, il a été envoyé delà les monts, en argent comptant, deux millions de livres, savoir : neuf cent huit mille livres qu’emporta Mesmin, deux cent mille livres qui ont été envoyées à M. de Chateauneuf, trois cent mille livres que j’ai fait toucher à M. le marquis de Cœuvre au commencement d’octobre, et six cent mille livres en novembre.

« Et pour soulager le peuple des armées qui retournaient d’Italie, qui l’eussent entièrement ruiné a été donné pour les licencier, ensemble l’armée de Champagne et celle de Picardie, deux millions trois cents et tant de mille livres en argent comptant, sans y comprendre trois mille trois cents Suisses qui étaient en Picardie et n’avaient fait que deux montres.

« Ce qui reste des armées de Champagne et de