555 ncurvns ' é d’arbres, fussent peuplées de plumes, tout cela ne pourrait pas encore me suffire pour te retracer ce que je sens pour toi. n l Avouez que Julie d'Estanges et Saint-Preux, qui pourtant s’éten- daient en protestations de ce genre, ne sontjamais allés aussi loin, et que leur imagination etleur langage étaient dépassés par notre r Cicéron de village. Assez loin de l'instituteur et presque au_bout de la table trônait carrément dans sa chaise un joyeux compèrc à cheveux rouges, à la figure empourprée et aux traits lins et malicieux: c’était le beau diseur de la société, le loustio de tous les repas et de toutes les fêtes. Joseph le facétieux, c'était son nom, avait tous les talents à la fois; tantôt, sans sortir de sa place, il amusait son auditoire qui l’adorait, par ses bons mots et ses curieuses anecdotes; tan- tôt, debout sur une chaise, battant _le tambour sur la table avec deux fourchettes en guise de baguettes, il assemblait son public ct contrefaisait à la perfection toutesles caricatures, toutes les ori- ` ginalités, tous les personnages excentriques de l’endroit et des environs, en les immolantà un parterre enchanté de ces chargœ boulïonnes; tantôt aussi, notre homme quittait soudain sa place pour reparaitre quelques instants après déguisé en turc, foulard rouge eu manière de turban sur la tète, moustache fabriquée avec un bouchon noircià la chandelle, veste retournée et panta- " lon large; assis dans un pétrin, il se faisait traînerjusque dans t la salle du festin, et là faisant le charlatan de la foire, donnant carrière à son esprit mimique et à son inépuisable éloquence, il dé- bitait ses drogues, arrachaitdes dents à ses compères, ct, comme bouquet, terminait par une improvisation en patois rimé, délice de l’auditoire, et qui eût pu rendre jaloux Pradel lui-même. W. (du Haut•Rhin.) I · (La suite au prochain numéro.) l ` l ·'¥ Digitized ay Google L
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