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RÉSIGNATION.

Le climat de la Flandre, sans avoir des froids extrêmes, est d’une morne tristesse : l’humidité, le brouillard, les nuages et la neige obscurcissent le ciel et glacent la terre pendant six mois de l’année. Une épaisse et noire fumée de charbon de terre, s’élevant au-dessus de chaque habitation, ajoute encore à la sombre apparence de cette petite ville du nord.

Je n’oublierai jamais la froide impression de tristesse que j’éprouvai en franchissant les ponts-levis qui lui servent d’entrée. Je me demandai avec effroi s’il y avait des êtres qui fussent nés là et qui dussent y mourir sans rien connaître du reste de la terre. Il y en avait en effet dont telle était la destinée. Mais la Providence, qui a des bontés cachées jusque dans les privations qu’elle impose, a donné aux habitants de cette ville, par l’absence de toute richesse, le besoin d’en acquérir, la nécessité du travail, ôtant ainsi à ces pauvres enfants déshérités le temps de regarder si le ciel est gris et privé de soleil. Ils oublient ce qu’ils n’ont pas ! Mais moi, en entrant dans cette ville sombre et enfumée, j’évoquai le souvenir de tous les jours de soleil qui avaient