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derne sous la forme bardd, au pluriel beirdd, beirddion.

Nous trouvons encore le nom des bardes en cornique, c’est-à-dire dans la langue néo-celtique qui était parlée dans la presqu’île anglaise de Cornouaille. Il y a au Musée britannique, dans le fonds coltonien, un manuscrit du douzième siècle qui contient un glossaire cornique ; et dans ce glossaire nous lisons : « Tubicen barth hirgorn… ; mimus vel scurra, barth[1]. »

Il y avait donc dans la Cornouaille anglaise, au douzième siècle, deux espèces de bardes : les uns soufflaient dans des instruments à vent, qu’on appelait hirgorn, c’est-à-dire qui étaient longs et faits d’une corne d’animal ; ils ressemblaient à ce que les collectionneurs appellent des oliphans : le glossateur rend leur nom en latin par tubicen. D’autres bardes chantaient des vers comme les jongleurs français du moyen âge ; le glossateur rend leur nom, barth, par le latin mimus vel scurra, « bouffon, baladin. »

Les Bretons émigrés en Gaule à l’époque où l’empire romain succomba et pendant l’invasion saxonne, portèrent le nom de bardes sur le continent d’où le triomphe de la langue latine l’avait banni. Sa forme actuelle est barz. On ne le trouve pas seulement dans les dictionnaires ou dans les textes de notre siècle. Dans le glossaire breton que Lagadeuc a composé sous le nom de Catholicon, vers la fin du quinzième

  1. Grammatica celtica, 2e édit., p. 1070.