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XVI

ÎLES SANDWICH

Wahoo. — Petit et moi. — Course à la pêcherie de perles de Pah-ah.

Comment expliquer les deux contrastes qui viennent de frapper mes regards, quand on les comprend à peine ? Vous avez vu les naturels d’Owhyée, en tout semblables aux volcans qui mugissent sous leurs pieds et sur leurs têtes, toujours prêts à s’élancer, à la moindre menace de la catastrophe.

À deux pas de là, Mowhée, calme et presque endormie, des hommes, des femmes, des enfants, laissant doucement glisser la vie, sans songer au jour qui vient de mourir, sans s’occuper de celui qui va naître, nonchalamment étendus sous leurs éternels parasols de verdure, et respirant à l’aise la brise de mer qui ne leur fait jamais défaut. Et maintenant encore, à deux pas de Mowhée, une île, Wahoo, peuplée de Sandwichiens d’une autre nature, d’une autre humeur, ou plutôt d’une race d’hommes donnant un perpétuel démenti, par leurs mouvements, aux êtres qui les entourent. À Mowhée, le bonheur, c’est le repos ; à Wahoo, il n’est que dans l’activité ; là-bas, on sourit quand on clôt la paupière ; ici, quand on l’ouvre après le sommeil ; d’une part, toute marche semble une tâche lourde et pénible ; de l’autre, toute course devient un amusement. Le bruit du canon ferait tomber en défaillance les habitants de