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XIII

ÎLES SANDWICH

Course avec Petit à l’océan de laves. — Taouroë. — Morokini. — Mowhée. Lahéna. — Paradis terrestre.

La veille même de notre départ tant désiré par nous tous, je voulus essayer encore une course au milieu des blocs de lave vomie par le Mowna-Kaah, afin de m’assurer si en effet, comme me l’avait dit M. Young, l’œil y chercherait en vain la plus légère tâche de verdure. Sur les flancs du Vésuve germent encore quelques arbustes assez vigoureux ; l’Etna voit tout près de sa cime des racines pleines de sève, poussant à l’air des feuilles riantes, jusqu’à ce qu’une colère du sol qui les porte les brûle ou les étouffe. Les voyageurs parlent des richesses botaniques qui ceignent le penchant rapide de l’Hécla ; et les cônes embrasés des Amériques ne sont pas plus meurtriers pour la puissante végétation qui grimpe de leur pied et va parfois couronner leur tête au-dessus des nuages. De là pourtant s’échappent des embrasements autrement sérieux que ceux qui ont englouti Herculanum et Pompéia ; mais aussi s’éloignent de là les prudents Indiens, qui ont bâti leurs villes sur des monts et dans des vallées que Dieu seul a la puissance d’ébranler. N’avais-je pas également trouvé, moi, à deux pas de Tinian, le mont Aguigan, paré, comme en un jour de fête, des riches productions végétales des