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brèche avec tous les habitants sachant le faire et étant sur la brèche. »

En conséquence de cette délibération, tous les habitants de Saint-Jean-de-Losne rassemblèrent au milieu de leurs chambres de la paille, des fagots et autres matières combustibles. Chacun paraissait se complaire dans ces préparatifs, comme s’il allait détruire les biens de l’ennemi plus que son propre bien. Des mèches partant des maisons aboutissaient aux rues. Des enfants étaient chargés d’y mettre le feu au moment où la grosse cloche sonnerait. Les archives de la ville rapportent qu’un d’entre eux, nommé Gaillard, ayant cru entendre le signal, approchait déjà le feu de la mèche qui devait incendier la maison de ses parents, lorsque des cris l’obligèrent d’attendre. L’assaut du 2 novembre dura quatre heures. Les assiégeants y perdirent 700 à 800 hommes ; les assiégés furent presque tous blessés ; des renforts arrivèrent et l’ennemi se retira.

Je ne comprends pas comment on a pu soutenir que la guerre des siéges n’exige pas de la part de soldats défendant pied à pied les environs d’une place, les glacis, le fossé, et définitivement la brèche, la spontanéité, la hardiesse, l’intelligence qui distinguent nos troupes ?

De pareilles qualités, au contraire, ne sont jamais plus utiles, plus en action. Alors le simple soldat lui-même agit souvent isolé, derrière un pli du terrain, derrière un pan de mur, derrière une fascine, dans des cavités verticales où il se blottit et que les ingénieurs appellent des trous de loup. Alors il soutient souvent des combats corps à corps. On pourrait comparer la vie du soldat