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du génie en retraite tire d’un calcul où figurent des signes algébriques cette conséquence étourdissante : cinquante mille soldats, en rase campagne, seraient aussi forts que soixante mille se défendant derrière une fortification quelconque. Serait-il donc vrai que les mathématiques pussent servir d’appui à ce qui blesse le simple bon sens ?

Non ! non ! les mathématiques n’ont rien à faire ici ; les prétendues formules de l’honorable colonel ne supportent pas un instant d’examen sérieux !

Pour mettre en relief les avantages incontestables de la mobilité, Napoléon disait, dans son langage sentencieux : La force d’une armée s’évolue par la masse multipliée par la vitesse. L’auteur des Considérations militaires adopte cet aphorisme comme une vérité mathématique. Il le traduit en caractères algébriques, et procède ensuite à la comparaison des troupes assiégeantes et des troupes assiégées. « Les premières, dit-il, manœuvrent, les tranchées marchent. » Dans l’évaluation de la puissance des assiégeants, on doit donc tenir compte, non-seulement de leur masse, mais encore de la vitesse qui les anime. Quant aux assiégés, comme ils ne marchent pas, l’auteur se croit autorisé à laisser de côté le multiplicateur dépendant de la vitesse ; aussi, quand il arrive à former la fraction destinée à donner le rapport numérique de la force des assiégés à la force des assiégeants le numérateur est une masse, et le dénominateur un produit où figurent à la fois une masse et une vitesse. Le numérateur et le dénominateur sont dès lors, comparativement, des quantités hétérogènes dont