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pendance, ou, si on l’aime mieux, aux actes de turbulence des Parisiens, à l’aide de deux citadelles, l’une en amont, l’autre en aval de l’enceinte. Les seuls moyens que possèdent des citadelles de pourvoir de loin à la tranquillité d’une population, ce sont des boulets, des obus et des bombes. Vauban, sans se croire un calomniateur du gouvernement de Louis XIV, admettait donc qu’en certaines circonstances, les deux citadelles de Paris devraient faire feu sur la ville.

L’autorité de Vauban n’est pas la seule que nous puissions invoquer. On connaît cette réponse d’Henri IV à une députation de la bourgeoisie parisienne : « On prétend que je veux faire des citadelles, c’est une calomnie. Je ne veux de citadelles que dans le cœur de mes sujets. »

Dans ses ouvrages classiques, Cormontaigne définissait les citadelles, « des fortifications destinées à contenir la bourgeoisie des villes et à faire respecter les ordres du prince. » On le voit, Cormontaigne, notre plus célèbre ingénieur après Vauban, disait les choses tout crûment.

Carnot (ce grand nom se place naturellement à côté de ceux que je viens de citer), Carnot, comme ses illustres prédécesseurs, ne voyait guère dans les citadelles que le moyen d’opprimer les citoyens. Aussi, en 1792, proposa-t-il à l’Assemblée législative de démolir les faces de ces ouvrages qui les isolaient, qui les séparaient des autres fortifications. Cette proposition, non agréée alors, reçut plus tard son exécution à Metz. Les bastions intérieurs de l’ancienne citadelle n’existent plus ; aucun canon des remparts n’est aujourd’hui tourné du côté de la ville.