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eux-mêmes se croient chargés de défendre des remparts imprenables ; il faut que les efforts qu’on leur impose soient justifiés par la grandeur du but. Ces deux conditions se trouveraient-elles dans les forts détachés considérés sans l’enceinte continue ?

Portons les garnisons de chacun de ces forts à 2, 000 gardes nationaux. Malgré les escarpes, les fossés, les confr’escarpes, les demi-lunes (s’il y en a), les casemates, 2, 000 gardes nationaux, isolés au milieu des plaines de Villejuif, de Montrouge ou d’Arcueil ; 2, 000 gardes nationaux entièrement séparés de la ville, ne se croiraient certainement pas en mesure de résister aux attaques d’une armée tout entière ? D’ailleurs, à cet égard, toute illusion disparaîtrait dès que l’artillerie ennemie aurait dirigé sur le fort les feux convergents de ses nombreuses batteries.

Le but unique, le but final de la résistance de chaque fort, serait d’empêcher l’armée envahissante de pénétrer jusqu’à la capitale. Ce but, les gardes nationaux croiraient-ils pouvoir l’atteindre, après avoir remarqué les immenses espaces compris entre un fort et les deux forts voisins, après avoir vu les détachements ennemis franchir ces intervalles sans de très-grandes pertes, surtout la nuit ?

Danger immense, utilité minime de la résistance, voilà ce que chaque garde national apercevrait clairement autour de lui. Ce n’est pas dans une pareille disposition d’esprit qu’on se décide à recevoir l’ennemi sur la brèche.