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Quel est celui de vous, Messieurs, qui n’a pas vu sur a Seine un batelet poussé par un vent d’ouest rester tout à fait immobile relativement au quai ? Cela vient de ce que la force du vent suffît tout juste pour contre-balancer le mouvement descendant du courant.

Comment détermine-t-on, en mer, le chemin qu’on a parcouru ? On jette une planche, on la suppose immobile ; or, souvent elle ne l’est pas ; souvent elle est entraînée par les courants. Vous croyez marcher, et vous ne marchez pas ; vous êtes comme l’homme qui monte le petit bateau dont je parlais tout à l’heure ; car celui-ci, quoiqu’il soit arrêté, croirait qu’il remonte le courant avec la vitesse dont ce courant est doué, si, comme le navigateur, il jetait une planche à l’eau et y prenait son repère.

Mais, dira-t-on, existe-t-il en mer des courants ? N’est-ce pas une considération théorique qui fait supposer qu’il y a au milieu de l’Océan de véritables rivières, marchant ici du nord au sud ; là, du sud au nord ; ailleurs, de l’est à l’ouest ? Or, de tels courants existent, sans aucun doute, et les erreurs qui en résultent sont souvent énormes.

Ainsi, je trouve dans le voyage du capitaine Marchand, si savamment discuté par M. Fleurieu, qu’il règne au nord de l’océan Atlantique des courants de neuf et de dix-sept lieues par jour.

Ailleurs, dans l’hémisphère sud, je trouve que le même capitaine Marchand, qui était au courant de toutes les méthodes scientifiques, s’était trompé de soixante-seize lieues dans un espace de quinze jours. Dans le même hémisphère sud, j’aperçois une erreur de l’estime de quatre-vingt-neuf lieues dans l’espace de dix jours. A