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MACHINES À VAPEUR.

chaque opération, cette eau, cette vapeur, cet air que le condenseur renferme, il finirait par ne plus produire d’effet. Watt opère cette triple évacuation à l’aide d’une pompe ordinaire qu’on appelle la pompe à air, et dont le piston porte une tige convenablement attachée au balancier que la machine met en jeu. Quand on calcule les effets d’une machine à feu de Watt, il est donc nécessaire d’avoir égard à la portion de force qui est destinée à maintenir la pompe à air en mouvement. Cette déduction, au reste, n’est qu’une petite partie de la perte qu’amenait, dans l’ancienne méthode, la condensation de la vapeur sur les parois refroidies du corps de pompe[1]

  1. On se fera une idée exacte de l’importance commerciale que l’invention du condenseur a eue, si l’on veut bien jeter les yeux sur le petit nombre de lignes qui suivent.

    Pour accorder la permission de substituer leurs machines à celles dites de Newcomen, Watt et Boulton exigeaient la valeur « du tiers de la quantité de charbon dont chaque nouvelle machine, à égalité d’effet, procurait l’économie. » Une expérience préliminaire faite sur deux machines de l’une et de l’autre espèce, ayant précisément les mêmes dimensions, montra à combien l’économie s’élevait, pour mille oscillations du piston, par exemple. Une simple proportion donnait ensuite les droits à percevoir dès qu’on connaissait le nombre d’oscillations que la machine employée avait fait chaque mois. Watt et Boulton déterminaient ce nombre d’oscillations a l’aide d’une pièce d’horlogerie attachée au balancier et disposée de manière que chacun de ses mouvements avançait l’aiguille d’une division. Ce mécanisme ou counter était renfermé dans une boîte à deux clefs qu’on ouvrait l’époque du règlement de comptes, en présence d’un agent des inventeurs et du directeur de la mine. Dans la mine de Chacewater, en Cornouailles, où trois machines étaient en jeu, les propriétaires rachetèrent le droit des inventeurs pour une somme annuelle de 60,000 fr., ce qui prouve que la substitution du condenseur, à l’injection qu’on opérait précédemment dans le corps de pompe, y avait procuré une économie de combustible de plus de 180,000 fr. par an.