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croit qu’à raison du mode d’action qui leur est propre, ils attirent la foudre ; on prétend qu’une maison pourvue d’un paratonnerre est plus souvent foudroyée que si le paratonnerre n’y était pas.

Cette opinion, Nollet la soutenait en 1764 ; Wilson aussi s’en montra le très-ardent avocat ; or, comme la garantie du conducteur ne paraissait pas infaillible, la multiplicité des coups, conséquence présumée de l’action de la pointe, devait, suivant ces deux physiciens, anéantir et au delà les bons effets du conducteur. Voilà comment ils arrivèrent à déclarer que les paratonnerres de Franklin étaient plus dangereux qu’utiles.

J’exciterai probablement quelque surprise si j’affirme qu’il y a des indices assez évidents de l’opinion que les paratonnerres à tiges pointues augmentent le nombre des coups foudroyants, même dans les écrits de partisans les plus déclarés de l’invention de Franklin ; mais, je le demande, que signifierait sans cela ce précepte de Toaldo : « À l’égard des magasins à poudre, il convient de se tenir sur la défensive, de ne pas placer de pointe sur l’édifice, et de se contenter de mettre toutes les pièces métalliques qu’on y remarque en communication avec le conducteur ? » Ce préjugé détourne beaucoup de personnes de recourir aux paratonnerres, par un sentiment analogue à celui qui les tiendrait éloignées d’un épais parapet en terre, contre lequel seraient incessamment dirigés les impuissants boulets d’une batterie ; mais il sera renversé de fond en comble si l’on veut seulement prendre la peine d’examiner avec un peu d’attention les faits rapportés dans le chapitre précédent.