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Je vais au-devant d’une difficulté que pourraient faire ceux qui n’ont pas de notions suffisantes de la physique moderne. Nous nous sommes servi de conducteurs en certains points desquels il y avait des solutions de continuité ; est-il démontré que des conducteurs continus ont aussi le privilége de s’imprégner de la matière fulminante des nuages et de la transmettre au sol ?

L’affirmative n’est pas douteuse ; mais ici nous ne pouvons pas recourir à des preuves empruntées aux sens de la vue et de l’audition, puisque tout se passe sans développement de lumière et en silence. Veut-on cependant s’assurer qu’en temps d’orage le conducteur continu transmet quelque chose ? qu’on en approche transversalement une aiguille, et elle s’aimantera tout comme elle le faisait sous l’action des étincelles remplissant la lacune. On n’a qu’à diminuer suffisamment sa masse, sans cependant le briser en aucun point, et une auréole de lumière sifflante l’entourera quelquefois dans toute sa longueur. Quand l’orage est très-fort, cette lumière apparaît, sans même que la masse habituelle du conducteur ait besoin d’être amoindrie.

Ainsi munie des nouveaux paratonnerres de M. Harris, dans lesquels le conducteur ordinaire des navires est remplacé par un poids égal de cylindres de cuivre mince qui enveloppent exactement les mâts et font corps avec eux, la frégate anglaise Dryad se trouva plusieurs fois exposée sur la côte d’Afrique aux violents orages que les navigateurs appellent tornados. La matière fulminante descendait alors le long de ces tuyaux de cuivre continus en telle quantité, qu’elle donnait naissance à une sorte d’atmo-