Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 4.djvu/323

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

§ 3. — Du bruit du canon considéré comme moyen de dissiper les orages.

Les navigateurs paraissent assez généralement persuadés que le bruit de l’artillerie dissipe les nuées orageuses et même les nuées de toute espèce, mais ils citent peu de faits authentiques à l’appui de leur opinion. Ce que j’ai recueilli de plus net sur un sujet aussi digne d’étude se trouve, à la date de 1680, dans les Mémoires du comte de Forbin, publiés pour la première fois en 1729.

« Pendant le séjour que nous fîmes, dit cet intrépide marin, sur ces côtes ( les côtes voisines de Carthagène des Indes), il se formait journellement, sur les quatre heures du soir, des orages mêlés d’éclairs, et qui, suivis de tonnerres épouvantables, faisaient toujours quelques ravages dans la ville où ils venaient se décharger. Le comte d’Estrées, à qui ces côtes n’étaient pas inconnues, et qui dans ses différents voyages d’Amérique avait été exposé plus d’une fois à ces sortes d’ouragans, avait trouvé le secret de les dissiper en tirant des coups de canon. Il se servit de son remède ordinaire contre ceux-ci : de quoi les Espagnols s’étant aperçus, et ayant remarqué que dès la seconde ou la troisième décharge l’orage était entièrement dissipé, frappés de ce prodige et ne sachant à quoi l’attribuer, ils en témoignèrent une surprise mêlée de frayeur, etc. »

Dans divers pays, les agriculteurs, encouragés par l’opinion des hommes de guerre, ont maintenant recours au bruit du canon lorsqu’ils se croient menacés d’un orage, et surtout d’un orage chargé de grêle. À quelle