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les personnes timides allaient s’abriter en temps d’orage. Suétone rapporte que l’empereur Auguste, qui craignait le tonnerre, portait toujours une de ces peaux.

Dans les Cévennes où, pendant si longtemps, il exista des colonies romaines, les bergers recueillent avec soin les dépouilles des serpents ; ils en entourent, encore de nos jours, la forme de leurs chapeaux, et dès lors ils se croient à l’abri des atteintes de la foudre (Laboissière, Acad du Gard). Ces peaux de serpents, suivant toute apparence, remplissaient jadis, dans l’esprit du peuple, le même office que les peaux plus rares et plus chères des veaux marins.

Il est assurément très-permis de critiquer le choix qu’avait fait Auguste des peaux de veaux marins, puisque aujourd’hui même nous ne saurions comment le justifier ni par le fait, ni théoriquement. Quant à l’idée qu’il peut ne pas être indifférent de choisir certains vêtements en temps d’orage, elle n’a rien de contraire aux connaissances des modernes sur la matière de la foudre.

Nous pourrions même citer des cas nombreux où des personnes paraissent avoir été, les unes préservées, les autres foudroyées, suivant qu’elles portaient telles ou telles étoffes.

Rubruquis, dans la Relation du Voyage en Tartarie, entrepris par ordre de Louis IX, dit que les habitants de ce pays ont une peur extrême du tonnerre. Le missionnaire assure que, dès qu’ils entendent le météore, les Tartares expulsent de chez eux tous les étrangers, s’enveloppent dans des feutres ou draps noirs, et restent ainsi immobiles tant que le tonnerre gronde.