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historiens. Une seule flamme (on lui donnait alors le nom d’Hélène), était considérée comme un signe menaçant. Deux flammes, Castor et Pollux, prédisaient, au contraire, du beau temps et un heureux voyage.

Si l’on est curieux de savoir sous quel point de vue les navigateurs contemporains de Colomb envisageaient ces mêmes phénomènes, nous emprunterons à l’Historia del Almirante, écrite par son fils, ce passage si fortement empreint des idées du xve siècle :

« Dans la nuit du samedi (octobre 1493, pendant le second voyage de Colomb), il tonnait et pleuvait très-fortement. Saint-Elme se montra alors sur le mât de perroquet avec sept cierges allumés, c’est-à-dire qu’on aperçut ces feux que les matelots croient être le corps du saint. Aussitôt, on entendit chanter sur le bâtiment force litanies et oraisons, car les gens de mer tiennent pour certain que le danger de la tempête est passé dès que Saint-Elme paraît. Il en sera de cette opinion ce qu’on voudra, etc., etc. »

Herrera nous apprend que les matelots de Magellan avaient les mêmes superstitions. « Pendant les grandes tempêtes, dit-il, Saint-Elme se montrait au sommet du mât de perroquet, tantôt avec un cierge allumé, et tantôt avec deux. Ces apparitions étaient saluées par des acclamations et des larmes de joie. »

En y regardant de bien près, peut-être apercevrait-on que le prestige dont les feux Saint-Elme étaient entourés dans l’antiquité, s’est conservé beaucoup plus longtemps qu’on ne paraît disposé à le croire. Quant à l’assimilation singulière de ces feux à des cierges allumés, on n’en