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LE TONNERRE.

Dans sa Météorologie, liv. iii, chap. 1er, Aristote, après avoir fait l’énumération des diverses espèces de foudres que les anciens distinguaient, dit en parlant des effets d’une d’entre elles : « On a vu le cuivre d’un bouclier

(mot à mot la cuivrure), se fondre sans que le bois (qu’il recouvrait) en fût endommagé. »

La propriété dont jouit la foudre de fondre les métaux est mentionnée aussi par Lucrèce, Sénèque, Pline. Ils citent spécialement le fer, l’or, l’argent, le bronze, le cuivre. La bizarrerie remarquée par Aristote à l’égard du bois s’était offerte aux philosophes de Rome dans des circonstances analogues. « L’argent, dit Sénèque, se fond sans que la bourse qui le contient soit endommagée L’épée se liquéfie dans le fourreau, qui demeure intact. Le fer des javelots coule le long du bois, et le bois ne prend pas feu. » Pline assure que « de l’or, du cuivre, de l’argent, contenus dans un sac, peuvent être fondus par la foudre, sans que le sac soit brûlé, sans que la cire qui le ferme, empreinte d’un cachet, ait été ramollie. » Lucrèce parle de la liquéfaction de l’airain.

À moins qu’on ne suppose que la puissance de la foudre se soit prodigieusement affaiblie depuis deux mille ans, nous aurons beaucoup à rabattre de ces résultats.

L’épée se liquéfie dans le fourreau ! Si par là on entend qu’un coup de tonnerre a liquéfié la masse métallique tout entière d’une large épée romaine, les observations modernes ne nous présenteront rien de semblable. Si le mot liquéfaction n’entraîne pas nécessairement l’idée d’une fusion générale ; s’il a suffi, pour qu’on l’employât,