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DULONG[1].

Messieurs, la perte inattendue qui réunit en ce moment autour de cette tombe tant de douleurs sincères, tant de déchirants regrets, est irréparable. L’Académie ne pouvait être plus cruellement frappée. Personne n’avait plus de savoir que Dulong ; personne n’en a fait un plus brillant usage. Ses magnifiques travaux resteront comme des modèles de sagacité, de pénétration, de patience, d’exactitude. En les méditant, les jeunes physiciens, les jeunes chimistes, verront se dérouler devant eux la voie pénible, laborieuse, semée de mille obstacles, mais la seule voie cependant par laquelle on acquière dans les sciences une gloire que le temps, l’esprit de système, les caprices de la mode ne sauraient ébranler. Ils apprendront aussi de notre confrère à ne point déduire de leurs travaux des conséquences exagérées, à rester dans les justes limites que l’expérience autorise, à être toujours vrais et sincères, à se défendre de ces promesses fantasques dont on berce si souvent la crédulité publique pour la misérable satisfaction d’un moment.

Ces traits caractéristiques de l’esprit de Dulong, de ses ouvrages, de toute sa conduite, sont connus de chacun de vous ; ils ont été justement appréciés du monde entier. Peut-être ne sait-on pas aussi généralement qu’avec des dehors froids, le savant illustre avait le cœur le plus affectueux, le plus aimant. Ceux qui vécurent dans

  1. Dulong est né à Rouen en 1785 : il est mort à l’âge de cinquante trois ans ; ses funérailles ont eu lieu le 20 juillet 1838.