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seul pas. Le mouvement de rotation primitif de la nébulosité ne se trouve point rattaché à de simples attractions ; ce mouvement semble impliquer l’action d’une force impulsive primordiale.

Laplace est loin de partager, à cet égard, l’opinion presque générale des philosophes et des géomètres. « Il ne croit pas que les attractions mutuelles de corps primitivement immobiles, doivent, à la longue, réunir tous ces corps à l’état de repos, autour de leur centre commun de gravité. » Il maintient, au contraire, que trois corps sans mouvement, parmi lesquels deux auraient beaucoup plus de masse que le troisième, ne s’aggloméreraient en une masse unique que dans des cas exceptionnels. En général, les deux corps les plus gros se réuniraient entre eux, tandis que le troisième circulerait autour du centre commun de gravité. L’attraction serait ainsi devenue la cause d’un genre de mouvement auquel l’impulsion semblait seule pouvoir donner naissance.

On pourrait croire, en vérité, qu’en exposant cette partie de son système, Laplace avait devant les yeux les paroles que Jean-Jacques a placées dans la bouche du vicaire savoyard, et qu’il voulait les réfuter :

« Newton a trouvé la loi de l’attraction, dit l’auteur d’Émile, mais l’attraction seule réduirait bientôt l’univers en une masse immobile : à cette loi il a fallu joindre une force projectile pour faire décrire des courbes aux corps célestes. Que Descartes nous dise quelle loi physique a fait tourner ses tourbillons ; que Newton nous montre la main qui lança les planètes sur la tangente de leurs orbites. »